Aurélie Belzanne est chargée de communication chez Asobo. Un studio où il fait bon vivre sur Bordeaux. Leur petit dernier, A Plague Tale : Innocence, va bientôt sortir. Et à lire les propos d’Aurélie, ce jeu est une belle promesse rendue possible grâce au travail d’une équipe talentueuse et passionnée. Pour en savoir plus, laissons Aurélie parler de son parcours et de son travail.
Bonjour Aurélie, que rêvais-tu d’être quand tu étais enfant ?
Je voulais un travail au grand air avec des chevaux ou des fleurs – quelque part, j’ai tout ça dans un jeu vidéo ^^.
Quel est ton parcours étudiant ? Pourquoi le choix du commerce et du management ?
Après un Bac Scientifique, j’ai effectivement opté pour une Sup de Co car un ancien élève de mon lycée était venu nous parler de ses études et cela me correspondait. De l’anglais, de la créativité, un penchant pour l’actualité, la culture générale et j’aimais être en contact avec beaucoup de monde différent. Cela m’a tout de suite parlé.
Comment es-tu arrivée dans le “petit” monde du jeu vidéo ? Quelle est ta première expérience ?
Au tout début j’ai commencé à travailler dans la musique.
Mon premier stage était chez Sony Music avec une grande dame du marketing de la musique française, aujourd’hui disparue. Elle m’a donné la chance de collaborer avec deux artistes formidables – Francis cabrel et l’équipe de Jean-Jacques Goldman. Puis quelques artistes internationaux, dont Beyoncé à ses débuts dans les Destiny’s Child. C’était rude, intense et très ingrat mais j’ai fait mes classes et j’y ai appris beaucoup.
Je suis ensuite arrivée au département vidéo et avec l’explosion du DVD on a tout de suite cartonné. Mon label a sorti Ze Inconnus Story et beaucoup de DVD de concerts. Un vrai tremplin sur un marché en plein boom.
Et Puis Ubisoft m’a fait confiance. J’étais joueuse depuis toujours. Entre 85 et 90 je jouais avec ma maman des week-end entiers sur mon PC à des jeux comme King’s Quest, Monkey Island, Maniac Mansion…
C’était mon rêve de gamine en fait de travailler sur des histoires aussi riches.
J’ai pu travailler sur les lancements de jeux incroyables comme Beyond Good & Evil, Splinter Cell, Prince of Persia, Dragon Quest et les tout premiers débuts d’Assassin’s Creed, Les Lapins crétins, Alexandra Lederman et la gamme de jeu Léa Passion, une réussite dingue qui a mené les petites filles du monde entier à jouer sur DS.
Comment a réagi ton entourage face à ton arrivée dans ce domaine ?
Très bien. Mes parents m’ont toujours laissée choisir ma voie. Je crois qu’ils étaient même fiers car dans ma famille ce n’est pas du tout commun.
Es-tu toi-même joueuse ? Joues-tu aux productions d’Asobo ?
Oui je suis toujours joueuse. J’ai moins de temps c’est sûr, mais je tente de me réserver un temps pour les jeux qui me passionnent vraiment.
Ma came, c’est assez simple, God of War, the Witcher, Ghost of a Tale, Gris… J’aime tout ça, la diversité, c’est ce qui fait l’attrait de cet univers.
C’est vrai que mon chouchou du moment c’est le jeu sur lequel je travaille A Plague Tale.
Quels ont été tes différents postes et sur quels jeux ?
J’ai d’abord été chef de produit chez Ubisoft sur Beyond Good & Evil, Splinter Cell 2 et 3, Prince of Persia.
Puis chef de groupe pour les jeux famille et licence.
J’ai ensuite choisi de partir m’installer en province où j’ai eu la chance après quelques temps passés dans la téléphonie et les applications mobiles de devenir responsable communication chez Asobo.
Nous y avons sorti des jeux très différents depuis mon arrivée : Kinect Rush, des jeux avant gardistes sur HoloLens (dont fragments une enquête policière qui me rend très fière de mes collègues).
Je m’occupe également de la communication entreprise et de développer l’image de notre Division Holographique b2b, lancée il y a deux ans environ, HoloForge interactive.
Explique-nous ton métier de “responsable communication” ? Quelles sont tes compétences ? Quel lien avec les autres corps de métier ?
C’est très varié.
Je suis chargée de promouvoir le studio et le savoir-faire de mes collègues pour faire en sorte que le studio soit reconnu.
Je m’occupe notamment d’échanger avec les journalistes, nos partenaires, les écoles, les institutionnels etc.
Je définis la charte de communication du studio et tous les outils qui vont permettre de le promouvoir au mieux, notamment sur les réseaux sociaux, les évènements, auprès des étudiants etc.
J’épaule également les équipes de nos partenaires éditeurs sur les sorties des jeux issus de chez nous.
Je collabore notamment avec les game designers, producers et artistes pour produire les assets et les argumentaires et messages qui seront utilisés dans la communication des sorties de jeux. Cela me demande notamment une adaptabilité et une agilité importantes.
Ainsi qu’une grande rigueur pour passer d’un sujet à l’autre et ne rien oublier, mais surtout une grande vigilance : la confidentialité est de mise !
Et aussi l’anglais : il faut vraiment bien parler anglais, sinon c’est vraiment compliqué.
Quel est le projet dont tu es la plus fière ?
C’est sans doute A Plague Tale, car nous sommes partis d’une feuille blanche, nous y avons cru envers et contre tout. Pour le moment l’accueil de ceux qui le testent est totalement en ligne avec ce que nous avons voulu créer.
Et comme il s’inspire du Sud-Ouest où nous vivons, il ne nous lâche pas vraiment même de retour à la maison.
Nos deux petits héros sont tous les deux un peu nos enfants depuis plus de trois ans. J’en ai presque la chair de poule rien que d’en parler en fait 😊.
Quel est ton pire et ton meilleur souvenir dans ta carrière ?
Le meilleur c’est certainement le jour où on m’a proposé de travailler sur Prince of Persia. C’était une marque mythique pour moi.
Je crois qu’en fait je n’y ai pas cru tout de suite. Mon chef de groupe à l’époque est un des collègues avec qui j’ai préféré travailler.
C’était galvanisant et mes assistants de l’époque étaient animés par la même énergie. On formait une super team.
Le pire ? J’ai quelques grands moments de solitude à mes tous débuts avec certains attachés de presse et chef de produit à la personnalité très spéciale dans l’univers de la musique.
A l’époque je n’avais pas beaucoup de réparti, c’est bien dommage 😊
Est-ce qu’être une femme dans le jeu vidéo apporte des avantages ou au contraire des inconvénients ?
Ca a toujours été neutre pour moi. J’ai eu l’opportunité de travailler avec des gens qui n’ont jamais fait de différence, qui m’ont toujours laissé prendre ma place en tant que pro tout court.
J’ai certainement eu beaucoup de chance mais je n’ai jamais ressenti que ça rentrait en ligne de compte. Je sais que ce n’est pas le cas partout. Donc je n’ai pas vraiment d’exemple à donner pour illustrer ça.
Ca peut sembler décalé par rapport à l’actualité mais c’est vrai.
A Plague Tale semble une très belle fierté pour toi et le studio. Peux-tu expliquer l’histoire du développement de ce jeu ? Pourquoi un tel attachement ?
Oui c’est clair. En fait l’idée vient principalement du fait qu’on voulait raconter l’histoire de deux enfants. C’était le point de départ.
De ce qu’ils vivraient s’ils étaient livrés à eux-mêmes, comment ils réagiraient sans l’aide d’un adulte dans un monde qui leur est hostile.
Un jour on est notamment tombé sur des gravures illustrant des contes de Grimm et de Perrault. Ca a été le tout début de la réflexion.
Avec les dessins animés des studios Ghibli aussi, on était tous fans de leur fraîcheur, de leur richesse, de leur audace aussi et du regard nouveau qu’il apporte depuis toujours sur les histoires d’enfants.
Et puis l’époque médiévale s’est petit à petit imposée comme une évidence, au 14ème siècle il y avait toutes les composantes d’un conte dramatique et émouvant à la fois.
La guerre de 100 ans, la peste noire, les campagnes reculées, pleins d’anecdotes qui venaient enrichir ce qu’on avait envie de raconter. Ici à Bordeaux et tout autour il reste beaucoup de traces de cette époque.
On a décidé de raconter cette histoire avec ce qu’on connaît le mieux et ce qui est le plus authentique pour nous : là où on vit.
Je ne suis pas narrative designer mais c’est un métier qui m’attire beaucoup, écrire les dialogues notamment. Notre narrative designer, Seb, a fait un boulot incroyable, il a beaucoup donné pour ce jeu, on lui doit beaucoup je pense.
Je suis assez fière d’avoir pu apporter ma pierre à l’édifice, même si je ne suis pas directement intégrée à la production.
Pourquoi et comment un (premier) partenariat avec Focus ?
En fait on a présenté le projet a beaucoup de partenaires et l’équipe de Focus nous a laissé totalement libres de faire ce qu’on voulait.
Ca a été assez évident de travailler avec eux. Ils ont laissé la liberté au studio et je crois que mes patrons ont choisi cette liberté.
Qu’est-ce qui te motive tous les matins à aller au travail ?
On fait un travail hors du commun. Ce n’est pas toujours facile car cela demande de l’implication, de l’énergie et de positiver tout le temps.
Mais clairement, peu de monde peut dire qu’il fait un travail aussi varié, riche et original que nous.
L’ambiance d’équipe, les gens passionnés…
Et puis le plaisir vivre 1000 histoires dans une vie. On n’est pas beaucoup à pouvoir le faire en travaillant.
Enfin, un conseil pour ceux et celles qui aimeraient travailler dans le jeu vidéo ?
S’ouvrir à toute la culture en règle générale. Lire tous les livres, écouter toute la musique / toutes les musiques, voir tous les films et toutes les séries. De toutes les époques, de tous les horizons.
Cultiver ça, ça permet de travailler avec tout le monde, de pouvoir épauler tout le monde, être agile et considéré(e) comme un bon professionnel et être écouté.
C’est une aide précieuse.
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