MISE A JOUR DU VENDREDI
Nous vous proposons chaque semaine de participer aux débats animés qui sévissent dans la rédaction : chaque jour l’un des membres de Joypad va poser son avis sur la question de la semaine, mais vous êtes très largement encouragés à participer à notre débat en vous fendant de commentaires constructifs, ou tout simplement en nous soutenant les uns les autres sur nos points de vue.
Autrefois confinée à la seule fin d’année, les sorties de jeux vidéo, en particulier sur Steam, se sont multipliées ces derniers mois. Au point qu’il est légitime de se poser la question :
Y a-t-il trop de sorties de jeux ?
Lundi : Le point de vue de Ghislain
Le chiffre commence à dater mais il fait peur : en juillet dernier, il y avait une moyenne de huit nouveaux jeux par jour sur Steam. Rajoutez les consoles, et il est évident que le portefeuille du joueur moyen n’arrive plus à suivre. Et c’est sans compter les DLC, ressorties HD et autres plateformes dédiées au retrogaming.
Une avalanche de sorties pourrait être le signe d’un secteur en plein boom. Hélas, je ne pense pas que ce soit le cas, car hormis quelques gros titres AAA vendus au prix fort avec des tonnes de DLC pour finir de vous fâcher avec votre banquier (ceci était une attaque gratuite contre Evolve), la plupart des nouveautés sont des jeux « modestes » ou indépendants vendus moins de 20 euros.
Si ce modèle du « titre sympa et pas cher », qui compensait son prix modique par de grosses ventes et un bon bouche à oreille fonctionnait il y a quelques années, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Combien de jeux sympas sont passés inaperçus, car noyés dans la masse du magasin de Steam ?
Une crise me semble inévitable. Peut-être pas un krach comme l’a connu le jeu vidéo dans les années 80, mais un gros « réajustement » qui risque d’emporter avec lui pas mal de studios « moyens ». Encore une fois, les éditeurs auront une responsabilité dans cette histoire : en se focalisant sur de grosses licences et en oubliant que le jeu vidéo a également besoin de ses séries B, ils ne jouent plus le rôle de filtre. Aujourd’hui, il est relativement facile pour un petit studio de se passer d’éditeur et débarquer sur Steam tout seul comme un grand. Ce qui veut dire aussi que le triage entre bons et mauvais jeux se fait par le consommateur et non plus par l’éditeur. Alors certes, de temps en temps on trouve une pépite. Le problème c’est que le sable est resté dans le tamis !
Ce n’est pas tant qu’il y a trop de jeux, c’est juste qu’il y a trop de petits jeux pas toujours intéressants qui font de l’ombre aux bons titres. Steam et dans une moindre mesure les XBOX live et PSN, sont en train de connaitre ce qui est arrivé au marché des applications sur mobiles : trop de propositions, pas assez d’intérêt. Tout le monde veut sa part du gâteau, mais l’appétit du public n’est pas extensible à l’infini.
Mardi : Le point de vue d’Aurélie
Premier constat : Il n’y en a jamais trop et il vaut mieux un large choix que rien du tout. En effet, c’est le signe d’une bonne croissance et que le support arrive à maturité. Le problème c’est l’indigestion ou les fruits pourris. Phénomène largement remarqué sur nos premiers mobiles et maintenant sur tablettes. Il y a trop de jeux et même dans la gamme des jeux gratuits (fonctionnant à la pub et au micro-paiement), alors nous ne savons plus où donner de la tête. Les budgets et le temps consacré à jouer ne suffisent pas !
Mais ce n’est pas nouveau, ni même propre au domaine du jeu vidéo. Littérature, musique, cinéma… Tous les jours, des dizaines de nouveaux titres sortent ! Et très rares sont ceux qui sortiront du lot pour faire partie de la culture populaire. D’autant plus que le grand public est friand de nouveautés mais qu’il reste majoritairement habitué à consommer des suites. Par contre, les passionnés d’un domaine vont multiplier leurs recherches et affiner leurs goûts pour tomber sur des perles rares. Les sites spécialisés fleurissent afin de recommander des œuvres (voir des chefs d’œuvre à connaître).
Enfin, l’histoire du monde du jeu vidéo fonctionne par cycles. Chaque nouvelle console ou plateforme a vu des démarrages en douceur, puis de plus en plus de jeux et enfin une offre trop exhaustive. Alors évidemment, si on englobe retrogaming, Serious game, jeux consoles et jeux PC, l’offre est très, voir trop, importante. C’est à vous, joueurs, de cibler vos recherches et et de savoir où regarder. Et ce n’est pas les magazines, les émissions télé, les sites internet ou les salons qui manquent !
Mercredi : Le point de vue de Régis
Vaste question que voilà ! En fait, cela dépend de la plateforme. Sur consoles, on voit bien aujourd’hui que les coûts de production empêchent les avalanches de jeux comme dans les années 90. Le syndrome des « jeux de merde » de la DS et de la Wii a également disparu et on a globalement une offre honorable, avec de la variété et de vrais bons titres. Sur Steam et iOS en revanche, il faut bien admettre qu’on se noie totalement dans la quantité faramineuse de productions. Et les petites pépites ont bien du mal à exister face aux ténors du support. Ceci dit, ce n’est pas facile pour les joueurs de s’y retrouver, tant la médiocrité côtoie le très bon.
En fait, on retrouve un peu le même questionnement que notre débat sur Super Mario Maker. Ce n’est pas tant la quantité qui est à montrer du doigt, mais surtout la qualité. Comme dit plus haut, le marché des consoles et du jeu « standard » sur PC est aujourd’hui moins marqué par cette différence flagrante entre jeux miteux et chefs d’oeuvre. Sur d’autres plateformes par contre, Steam et tablettes/smartphones, c’est une paire de manches. Certains développeurs -petits studios- tirent la sonnette d’alarme depuis longtemps tant leurs créations sont noyés dans la masse. Beaucoup quittent Steam ou les applications à la Apple pour se barrer sur PC ou même eShop, PSN et Xbox Live. Si certains craignent un krach façon E.T et Atari en 83, on n’en est pas là mais il va falloir faire gaffe.
Jeudi : Le point de vue de Nicolas
Ne généralisons pas, ce sujet touche en effet essentiellement le catalogue Steam. Sur console, ou pour les joueurs qui ne consomment que du triple A, tout va bien. Je dirais même que ça pourrait manquer de titres, pour peu qu’on finisse les jeux rapidement et qu’on en redemande sans cesse. Personnellement, ça m’arrange, cela me permet de rattraper mon petit retard sur certains jeux. Concernant Steam, comme on dit, il faut de tout pour faire un monde. La variété de choix permet de brasser un large public, mais cet océan de jeux risque en effet de finir par noyer le poisson. Il est clair que le consommateur a de quoi s’y perdre, mais si on y regarde de plus près, c’est une aubaine pour la presse JV. En effet, à nous d’aiguiller le joueur vers le jeu bien caché sous la montagne d’articles !
Mais vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bons ou mauvais jeux, tous les goûts sont dans la nature et il y a un public pour tout. Après tout, si les systèmes de crowdfunding et Steam Greenlight fonctionnent, ça veut bien dire qu’il y a des gens qui sont intéressés par le produit proposé. Ceci dit, Steam a tout intérêt à ralentir le rythme des sorties, sinon en effet, ça va devenir un vrai problème…
Vendredi : Le point de vue de John
Il est amusant de voir comment le marché à évoluer ces dix dernières années. Sans remonter aussi loin qu’à l’époque de la PS2, mais en débutant ses souvenirs aux lancements des Xbox 360 ou de la PS3. Des jeux d’éditeurs, qui ne s’appelait pas encore AAA ou Blockbuster, il y en avait à la pelle. Il y avait des périodes de l’année plus riche que d’autres. Les fêtes de fin d’années étaient parfois aussi bouchées que le périph’ au petit matin. Puis l’autre période de point était le printemps et le début de l’été, entre mars et juin. Laissant ainsi aux joueurs des périodes creuses pour rattraper son retard vidéo ludique avec soldes et bon plans, entre janvier et mars ou entre juin et septembre.
Les éditeurs dominaient le marché en major absolue. Les jeux étaient de toutes les qualités, bonnes ou mauvaises. Puis il y a eu comme un premier boom. Les machines ont gagnées en puissances et développer un jeu coûtait plus d’argent, et ce n’était pas forcément rentable. Les éditeurs historiques (Ubisoft, Activision, EA, THQ, Capcom, Konami, SquareSoft et j’en passe) ont du s’adapter et faire attention à leur propre production. Prendre plus de temps pour développer un jeu. Espacer les sorties, quitte parfois à louper les fêtes de fin d’années pour sortir 3 à 6 mois plus tard.
Ces trous ont laissé la place à une nouvelle vague de développeurs en quête d’indépendance. Les plate forme comme Steam et le Xbox Live ou le PSN, ont ouvert les portes à toutes les dérives. Tout comme Kickstarter, qui ne cesse de proposer des projets, sans pour autant trier leur sélection. Dans l’inconscient collectif, jouer sur console ou PC, rime encore avec des titres majeurs, surnommé maintenant Blockbuster. Ceci dit, merci aux indépendants d’avoir alimenter les PS4 et Xbox One pendant la famélique période de lancement de ces nouvelles machines.
Tout le monde veut une part du gâteau… Mais attention, plus le buffet est énorme, plus la sensation de faim est grande et l’indigestion ne sera pas uniquement pour les convives, les cuisiniers ont aussi un rôle à jouer pour éviter de gâcher de la nourriture.