Il y a maintenant presque trois mois sortait l’intriguant White Night, ce jeu à la direction artistique aussi noire que son ambiance. Forts de leurs expériences dans les industries du graphisme, du cinéma et bien évidemment du jeu vidéo, les français du studio Osome ont voulu créer un jeu atypique rappelant l’époque nostalgique des survivals horror en vue caméra fixe. Histoire de vous proposer un test un peu plus original que la moyenne, nous vous proposons une narration autour de mon expérience de jeu, qui a pour objectif de vous faire partager l’atmosphère unique du titre d’Activision, et pour moi de prolonger un peu plus cette surprenante aventure.
Un rêve éveillé
Plongé dans une nuit noire au cœur d’un coin paumé de la banlieue de Boston en l’année 1938, je me retrouve dans la peau d’un homme élégant, à l’allure d’un détective privé ou d’un homme d’affaire. J’entends ses pensées et je le vois subrepticement fermer le coffre de son véhicule. Il allume une cigarette dans un mouvement précis et déterminé, sur le parking du bar tout proche de lui. Le visage fermé, il observe le croissant de lune dans le ciel qui diffuse une étrange lumière inquiétante. On entend dans le bâtiment un morceau de Jazz sur fond de contrebasse rythmique. La chanson se termine et des applaudissements retentissent, ce qui provoque chez l’individu une curieuse réaction de fuite. Il s’empresse alors de prendre le volant et de quitter l’endroit, comme s’il cherchait à s’échapper d’une situation inextricable. Sur la route, je constate que j’ai un certain contrôle sur la voiture et que je peux agir sur sa trajectoire ou sa vitesse, sans pour autant choisir librement où je souhaite me rendre. En réfléchissant sur le trajet qui me conduit vers l’inconnu, je prends conscience de mon intervention, comme si ma propre personnalité s’emparait peu à peu de l’âme de ce mystérieux personnage…
Aux confins de l’indicible
Sur la route, une envoutante musique jazzy ponctue le chemin, créant une ambiance assez mélancolique. On arrive à hauteur d’un pont qui chevauche la Mystic River, au loin, une étrange lueur bleutée scintille dans l’obscurité. Il est trop tard pour constater qu’il s’agit en réalité d’une silhouette de femme qui se trouve au beau milieu de la route, celle-ci dégage d’ailleurs une étrange impression fantomatique. Impossible de maîtriser le véhicule en tentant d’éviter le choc, qui sort de la route dans un crissement de pneu terrifiant et finit sa course effrénée dans un arbre. En reprenant conscience après l’écoute d’une nouvelle pensée de mon acolyte en souffrance, je constate que j’ai désormais le contrôle absolu sur ses mouvements (comme s’il n’était plus vraiment lui-même). Grièvement blessé, je titube vers une grille qui ressemble à l’entrée d’une grande propriété. Il me faut de l’aide, je décide donc de franchir l’enceinte en espérant trouver quelqu’un. Sur la boîte aux lettres on peut lire « Vesper Manor », probablement le nom de la famille qui vit ici. Je peux accéder à tout moment à un journal intitulé Boston daily news, qui semble recueillir les pensées de mon autre conscience qui vit cette aventure avec moi. Même si ce nom semble évoquer un lointain souvenir pour lui, le choc de l’accident lui hôte tout moyen d’accéder à sa mémoire…
Dans la pénombre, une lueur d’espoir
Les écrits et dialogues de ce curieux personnage, qui est désormais aussi amnésique que moi dans cette histoire, sont particulièrement réussis et dénote un sens assez poétique chez mon nouvel ami. Je franchis l’enceinte de cette propriété et me retrouve face à une demeure tout droit sortie du film Psychose d’Alfred Hitchcock. Je constate très vite qu’il y a peu de chance de trouver qui que ce soit à l’intérieur, un panneau « A vendre » aussi vieux que le manoir étant planté juste devant le perron. Impossible de faire machine arrière, peut-être trouverais-je un téléphone à l’intérieur. Un jeu d’ombre et de lumière parfaitement adaptés à cette direction artistique me permet de trouver le moyen d’entrer dans le manoir. Dans un grincement typique des maisons hantées, je franchis l’imposante double porte qui me conduit dans le hall d’entrée. Quel ne fut pas mon réconfort de trouver là juste devant moi, un téléphone. Je m’empresse de décrocher le combiné mais n’entend que d’étranges sons, composés pourtant de voix qui semblent vouloir communiquer…
Lumière, survie, vérité
Plongé dans le noir le plus totale, mon partenaire me précise qu’il a des allumettes dans sa poche, de quoi me permettre d’y voir un peu plus clair dans cet épais mystère obscur. A peine ai-je craqué l’une d’entre elle, qu’une silhouette effrayante apparaît un court instant derrière moi. Je ne suis pas seul dans cet endroit, et je m’aperçois rapidement que ces ombres terrifiantes ont des attentions on ne plus hostiles à mon égard. Ces « shadows », ne sont pas sans rappeler les mouvements malsains du bestiaire d’un certain Silent Hill 2, ces atrocités démoniaques allants parfois jusqu’à disparaître et réapparaître sous mon nez. Un seul contact avec l’une d’entre elles, et c’est la mort assurée.
Impossible pour moi de ressortir de cet antre du diable, la seule sortie étant inexplicablement condamnée. Heureusement pour ma survie, l’électricité est installée dans la bâtisse, créant des zones illuminés à l’abri de tout danger, me permettant parfois de me reposer dans de confortables fauteuils (et sauvegarder, par la même occasion). Pour progresser, seules les allumettes disséminées un peu partout me permettent un semblant de lumière dans ce néant d’obscurité. Un geste maladroit peut aléatoirement gâcher ces précieuses petites torches, ajoutant un stress supplémentaires quand le stock s’épuise dangereusement. En explorant les lieux, je trouve de nombreux documents sur les propriétaires et comprend rapidement qu’il me faut consulter chacun de ces précieux écrits pour mieux découvrir ce qui s’est passé ici. Cette famille, pourtant très religieuse, va progressivement sombrer dans un monde à glacer le sang…
Le bug de la peur
Après plusieurs heures de progression conduisant plus profondément dans les entrailles du manoir Vesper, j’en sais maintenant suffisamment sur l’histoire de cette famille et sur mes ennemis pour pousser mon investigation jusqu’à son dénouement. Je cherche désespérément à accéder au grenier de la demeure, mais je suis confronté à la plus terrifiante des expériences pour un gamer, un bug aussi aléatoire que rarissime. La peur virtuelle se transforme dès lors en frayeur concrète, à l’idée de perdre le bénéfice de ces heures à arpenter les couloirs de cette horrible demeure (parfois dans la souffrance et la difficulté). La caméra fixe ne me suit plus, elle reste figée comme s’il était devenu trop difficile pour elle d’aller plus loin. La solution que m’apporte les développeurs est pourtant simple, persévérer sans relâche. Pour corriger cette ignominie, Activision doit sortir le portefeuille, mais comme la fréquence du bug est de l’ordre d’un sur mille, voir dix mille, peu de chance qu’il se volatilise tel les ombres chassé par la lumière…
Le tableau noir
Cette expérience malheureuse fut vite effacée par le soulagement de retrouver le contrôle de cette caméra fixe apeurée. Cependant, d’autres éléments de gameplay ont été tout aussi désagréable et ont crée d’incontournables moments de frustration. L’inconvénient majeur d’un jeu en caméra fixe, c’est la visibilité parfois réduite à sa plus faible expression. Quand en plus la lumière se fait rare, on peut très vite se coincer les pieds dans le tapis. Ainsi, on se retrouve parfois piégé par un élément du décor au ras du sol qui vous fait courir sur place, laissant le temps à l’ombre poursuivante de vous rattraper sans peine. Un bug de contrôle peut également survenir et ne pardonne pas, surtout dans les moments délicats. Les créatures de la nuit que l’on rencontre ont l’avantage pour le joueur d’avoir une très mauvaise vision. Il faut donc être très proche de l’une d’elle pour provoquer son courroux. On se retrouve parfois à la limite d’être détecté, il convient donc de faire demi-tour délicatement pour ne pas être repéré. Ce bug de maniabilité a une fâcheuse tendance à vous retourner dans la direction opposée à celle de votre choix, ce qui conduit généralement tout droit dans les bras du monstre, nécessitant une fuite non désirée dans la panique la plus totale !
Conclusion du rédacteur : BON
Le premier jeu qui m’est revenu à l’esprit en arpentant White Night est le tout premier Alone in the Dark (bonjour le coup de vieux). Son aspect énigmatique force le joueur curieux à se poser des milliers de questions, qui trouvent leurs réponses de multiples façons. Les textes, les décors ou encore les attitudes des mystérieux protagonistes éclaircissent les interrogations. Le titre d’Osome s’inspire également d’événements réels, comme le crack boursier de 1929, la prohibition ou la culture jazz. Mêlé à de tragiques faits divers sortis tout droit des esprits torturés de l’équipe de développement, cela donne un survival horror à suspens des plus appréciables. Cependant tout n’est pas irréprochable, les angles éloignés de certaines caméras fixes font parfois perdre les repères ou pire, la partie elle-même. L’inventaire est trop visible à l’écran et à tendance à perturber l’immersion du joueur. Malgré ces quelques défauts, la direction artistique de White Night impact directement le gameplay de part son aspect noir et blanc, ce qui crée une expérience unique en son genre. Un jeu incontournable pour les amateurs du genre.
Les points forts :
- Direction artistique unique en son genre
- Gameplay qui rappelle les monuments du survival horror
- Suspens et frayeurs garanties
- Ambiance sonore et musicale immersives
Les points faibles :
- Angles parfois trop éloigné des caméras fixes
- Maniabilité imprécise en cas de mouvement délicat
- Inventaire encombrant visuellement