Ah, Speed Devils. Face aux ténors de la Dreamcast, le jeu d’Ubisoft pouvait faire pâle figure. Transfuge du PC, cette adaptation console de “Speed Busters” a de sacrés atouts. En dehors des graphismes au top, des musiques rythmées et des sensations de vitesse plutôt grisantes (surtout avec les derniers bolides), ce titre a une particularité vraiment fun : ses circuits ! Truffés d’obstacles, ces derniers évoluent au fur et à mesure de la progression du joueur. Les simples petites animations de départ peuvent vite se transformer en redoutables pièges routiers. Et à l’orée de 2015, le titre d’Ubi assure grave !
Soyons honnêtes, il faut reconnaître que Speed Devils, aussi bon soit-il, n’est pas le premier jeu auquel on pense lorsqu’on revient sur la ludothèque Dreamcast. Présent lors du lancement de la console de SEGA, il s’est confronté à de véritables blockbusters en puissance. En face, il y avait du Sonic, du SEGA Rally 2, du Power Stone ou encore du Virtua Fighter 3tb, pas facile donc de se faire une place. Pourtant, toutes celles et ceux qui ont donné une chance au titre d’Ubi ne l’ont pas regretté. Très bien accueilli par la presse spécialisée, Speed Devils débarque de l’univers PC. Intitulé Speed Busters sur ordi, il s’agit d’un jeu de course faisant la part belle aux sensations arcade. Très fun, le jeu propose un contenu plutôt agréable avec 13 circuits et une douzaine de bolides. Pour ne rien enlever à son charme (du jeu, pas de la nana du dessous), un mode multijoueur (ultra complet pour l’époque) est présent.
Les démons de la vitesse
Speed Devils, s’il ne réinvente rien, a le mérite d’être cohérent dans ce qu’il présente. Il faut dire que l’équipe en charge du développement n’a pas fait les choses à moitié. Réalisé par une équipe de 27 personnes, Speed Devils est plus qu’une simple conversion de Speed Busters comme l’explique le producteur Alexandre Thabet dans une interview du Dreamcast Magazine (UK) de septembre 99 :
”Nous avons commencé par analyser les forces et faiblesses du jeu PC. Comme nous avons eu d’excellents retours de la part de la presse et des joueurs, nous nous sommes focalisés sur les points forts, en gommant au mieux les faiblesses de l’original. Et bien sûr, nous avons adapté le jeu au support Dreamcast“.
En s’appuyant sur le pep’s de la version PC, la trentaine de personnes en charge du jeu ont intégré de nouveaux éléments, comme le rapporte le producteur :
“Nous avons débuté avec les mêmes circuits et voitures que la version PC, puis nous en avons ajouté des inédits pour Dreamcast. On a repris d’anciens circuits et on en a fait de nouveaux tracés, pour apporter plus de variété. Par exemple, nous avons un circuit qui se passe en Louisiane, mais aussi le circuit “Louisiana Tornado”, il y a aussi une piste à Hollywood et une autre intitulée “Hollywood Disaster” avec un tremblement de terre“.
Autant dire que manette en main, on prend un véritable plaisir à découvrir tous les raccourcis et les innombrables animations. Impossible de ne pas sourire lorsque, fonçant à travers un tunnel, vous apercevez un mec en parapente qui hurle son bonheur. Impossible de ne pas citer également les multiples clins d’œil du tracé Hollywood. De King Kong à Jurassic Park en passant par les Dents de la Mer, le septième art est aux anges. Speed Devils est un gros bonbon qui ne se prend pas au sérieux et ça fait du bien ! Durant les courses, outre le besoin de terminer premier, vous pouvez aussi foncer pour briser les radars de vitesse et ramasser un max de pépettes. Du tout bon !
Un contenu de qualité
Vu comme ça, il n’y a pas à se trémousser sur les modes de jeu. Arcade, Championnat, Multijoueur, le tout paraît ultra banal. Pourtant, en se penchant sur la partie Championnat, on découvre plein de petits éléments savoureux. Par exemple, il est possible de faire des paris afin d’amasser de l’argent plus facilement, vous pouvez aussi passer par la case customisation pour booster votre bécane ou encore faire un tour chez le concessionnaire du coin pour acheter ou vendre des bolides. Speed Devils est d’ailleurs très cool en matière de peinture, avec des teintes classiques et des décalcos parfois complètement barrées. Pour l’époque, en 99, ça faisait son petit effet ! En même temps, au départ, les caisses que vous pilotez n’ont rien d’exceptionnel, donc autant qu’elles soient agréables à regarder ! Pour obtenir les bagnoles les plus rapides, il va falloir s’accrocher ! Les accidents sont présents (il y a 8 points d’impact et 4 niveaux de dommages et il n’y a rien de pire que de flinguer ses phares… durant les courses nocturnes) et vous pouvez même choper de la nitro pour griller vos concurrents. Arcade jusqu’au bout ! Une fois le pad en main, les commandes sont ultra instinctives et on s’éclate ! Le replay est d’ailleurs très pratique pour pleinement apprécier la variété des circuits, des paysages et surtout des animations de chaque piste.
VMS au rapport
L’architecture en ligne de la Dreamcast n’étant pas en place pour le lancement de la console, c’est donc sans trop de surprise que Speed Devils ne propose pas, dans sa première version (on y reviendra), un mode online. En revanche, Ubisoft a étudié le concept du VMS (ou VMU, la fameuse carte mémoire à écran) comme le rapporte Alexandre Thabet :
”Quand nous avons commencé le développement, nous nous sommes demandés comment nous pouvions adapter le jeu sur Dreamcast. Nous nous sommes donc penché sur le hardware de la console et nous avons réfléchi à la manière d’exploiter les différentes features de la machine, à commencer par le VMS et le modem. Pour le modem, malheureusement, nous avons dû abandonner parce que nous n’utilisions pas Windows CE et de toute façon, il n’y avait pas vraiment d’éléments pour exploiter le modem. Pour le VMS, c’est quelque chose sur laquelle nous avons travaillé. Avec Speed Devils, le VMS a deux options. Il sauvegarde votre progression dans le championnat mais vous pouvez aussi l’enlever de la manette et regarder combien de véhicules vous avez dans votre garage, combien vous avez gagné et combien de points il vous reste à obtenir pour passer à l’étape suivante. Deux joueurs peuvent aussi s’échanger leurs voitures en connectant deux VMS ensemble. Pour terminer, durant la course, le VMS devient un radar vous montrant votre position et celle de vos opposants. ”
Difficile de se plaindre, Speed Devils assure vraiment à tous les niveaux ! Il faut aussi souligner l’originalité de ses modes de jeu multijoueur, voyez plutôt :
– Course Normale : il s’agit d’une course simple, disputée entre les deux joueurs. Le premier qui franchit la ligne d’arrivée est déclaré vainqueur.
– Décalage temporel : À chaque point de contrôle du circuit, le différentiel est converti en points. Le joueur détenant le plus de points après trois tours est déclaré vainqueur.
– Distance de décalage : Les joueurs sélectionnent une distance et disputent la course jusqu’à ce qu’ils soient séparés par la distance définie. Aucun décompte des tours n’est tenu jusqu’à ce que cette distance soit atteinte.
– Défense et attaque : Ce mode comprend neuf tours. Pendant chacun d’entre eux, l’un des joueurs gagne des points en tentant de doubler le deuxième, pendant que celui-ci tente de l’en empêcher. À l’issue des neuf tours, celui qui compte le plus grand nombre de points remporte la partie. (en clair, une espèce de chat et souris automobile)
– Défis Spéciaux : Six icônes sont affichées, représentant six catégories différentes. Le joueur ayant dominé le plus grand nombre de catégories, au bout de trois tours, est déclaré vainqueur, qu’il ait ou non gagné la course. Les catégories sont les suivantes : meilleur tour, moins de nitro utilisée, temps en tête, plus d’argent gagné, plus de radars détruits, moins de dommages.
Speed Devils a vraiment un petit quelque chose à part. Quelque chose qui en fait éminemment un titre sympathique. L’essayer, c’est l’adopter, surtout que les graphismes ont plutôt bien vieillis. En dépit de quelques textures parfois moyennes et d’une modélisation “au couteau”, le jeu reste très plaisant à regarder. C’était l’époque des effets à tout va, avec de la transparence, du lens-flare (effets de soleil) ou de la réflexion sur les carrosseries à gogo !
Le fun à l’état pur
Pas de doute, Speed Devils assure le spectacle. Pour les besoins du dossier, j’ai relancé le jeu et j’avoue avoir passé plusieurs heures à redécouvrir chacune des pistes et des raccourcis. C’est toujours un vrai bonheur de remonter la colline d’Hollywood et voir l’éclair frapper l’une des fameuses lettres qui surplombe Los Angeles. Et quand on croise la tornade de Louisiana Tornado, il est préférable de ne pas rester dans son sillage. De l’arcade comme on l’aime ! Aujourd’hui, Speed Devils est trouvable pour une dizaine d’euros. On trouve aussi des versions neuves à des prix plus élevés. À noter qu’il existe une version intitulée Speed Devils Online. Parue fin 2000, Speed Devils Online intègre un mode en ligne, propose une interface inédite et surtout une nouvelle course : Montreal Industrial, divisée en deux tracés. Quant à Speed Devils, il fut l’une des toutes premières productions de Ubisoft Montreal et s’est plutôt bien écoulé. Certaines personnes parlent de Speed Devils comme étant la meilleure vente d’Ubisoft (en tant que développeur) sur Dreamcast. C’est possible, mais à vérifier car Ubisoft a aussi développé des titres très sympas sur la console, dont un fantastique Rayman 2. En tout cas, si l’envie vous tente de vous essayer à Speed Devils, foncez !