Au sein de Sony, Kazunori Yamauchi est un créateur absolument intouchable. Cela fait maintenant près de 20 ans que sa série phare abreuve régulièrement les plate-formes de la marque PlayStation. 20 années durant lesquelles le fou d’automobile n’a cessé de puiser dans son perfectionnisme pour nous faire vivre, virtuellement, des courses à très haute intensité. Cet amoureux de la nature n’a jamais fait les choses au hasard et c’est bel et bien pour effectuer des tests et des essais pour une simulation automobile qu’il va concevoir Motor Toon Grand Prix. En partant de cet ersatz de Mario Kart, le Japonais va alors donner vie à un titre d’un réalisme stupéfiant : Gran Turismo. Deux décennies plus tard, le passionné a plus que jamais la confiance de ses pairs et dégaine un épisode surprenant.
La première chose qui saute aux yeux dans Gran Turismo Sport, c’est son habillage. Les développeurs ont mis le paquet pour nous proposer deux cinématiques d’ouverture somptueuses et une interface qui force le respect. Sans mentir, les menus sont parmi les plus beaux aperçus dans un jeu de bagnoles. C’est épuré, ergonomique, fonctionnel et les musiques, qui sont généralement des sonates d’ascenseur chez la concurrence, se révèlent juste parfaites. Entre les pincées de cordes, les mélopées au piano et les vagues de synthé à la Jean-Michel Jarre, le titre de Polyphony distille une ambiance planante et reposante. Comme, en plus, l’image en arrière-plan change sans arrêt et que le titre nous gratifie d’infos historiques sur l’automobile, on ne peut que s’incliner. Même si, on vous le concède, un habillage ne fait pas la qualité d’un jeu.
Pas pour les solitaires
Cela ne vous aura pas échappé mais Gran Turismo Sport n’a rien d’un septième épisode canonique. Même si on l’aura attendu un bon moment, il n’est en rien celui qui fera bondir d’amour les amateurs de mode carrière, de championnats et autres compétitions contre l’IA. Et pour cause : il n’y en a pas ! Cela peut paraître hallucinant pour un GT mais c’est pourtant la réalité. À la place, la galette nous gratifie d’un mode Arcade réunissant des courses simples (38 épreuves), le contre-la-montre, des défis dérapages, des courses personnalisées (avec la config de votre choix), le split screen pour deux joueurs et enfin l’expérience VR. Si l’ensemble est sympathique, il est malheureusement beaucoup trop limité pour tenir sur la longueur. Il en va de même pour la « campagne » qui s’apparente à un gros tutoriel avec des leçons de conduite, des missions (avec différents objectifs, comme des plots à dégommer) et un apprentissage soutenu des trajectoires à négocier pour chaque circuit. Cela va vous tenir en haleine quelques heures mais ça n’ira pas au-delà, à moins de vouloir obtenir l’or sur la totalité des défis (même si le bronze suffit pour débloquer les casques, combinaisons, voitures et pistes).
Malgré son côté gadget, on apprécie la présence du mode VR. Avec le casque sur la tête et un volant dans les mains (G29 de Logitech), l’expérience s’est révélée assez folle. Déjà, on peut le dire, les graphismes sont largement supérieurs à un Drive Club VR et ils sont surtout bien plus stables. Cela dépend bien sûr des personnes mais nous n’avons ressenti aucune sensation de motion sickness, là où Drive Club peut se révéler assez éprouvant pour l’estomac. Plongé dans l’habitacle de nos bolides, il faut bien reconnaître que l’immersion est là. On a véritablement l’impression d’être au cœur des joutes automobiles, on peut regarder partout et c’est franchement excellent. Par conséquent, c’est un véritable crève-cœur de se dire qu’il n’y a qu’un seul et unique concurrent. Pour que l’animation ne subisse aucun à-coup, les développeurs ont dû faire des concessions et c’est bien dommage car ce mode en réalité virtuelle est vraiment réussi. On passera en revanche sous silence l’option showroom qui ne sert strictement à rien, si ce n’est reluquer une bagnole et allumer et éteindre ses phares. Totalement superflu et inintéressant.
La compét’ mondiale
Après quelques heures passées sur les modes Arcade et Campagne, il sera temps de défier de véritables joueurs. Le jeu en ligne est assurément LE gros morceau de ce Gran Turismo Sport. Polyphony a passé un temps fou à mettre en place cet aspect et on peut dire qu’ils ne se sont pas foutus de nous. Après avoir participé à deux cours de fair-play (car il ne faut pas déconner avec les règles), vous pourrez rallier les joueurs du monde entier. Le jeu propose ainsi un système de courses journalières (trois par heure) avec la possibilité de participer aux qualifications et donc de démarrer dans les premières places. En complément de ces défis quotidiens, des championnats sont disponibles afin de gagner des points. Là encore, au nombre de trois, ils sont hebdomadaires et débutent à des heures précises. Vous pourrez également vous lancer dans des tournois par nation ou par constructeur. Autant dire que les amoureux du volant et des courses en ligne seront conquis. À côté de ça, le salon réunit tout ce que l’on a l’habitude de voir dans les jeux à dominante multijoueur, c’est-à-dire la création de courses entièrement personnalisées pour s’éclater avec ses amis ou d’autres pilotes inconnus. Cela peut sembler léger pour certains mais le principe de défis réguliers, avec le calendrier qui va bien, fait qu’on y revient un peu tous les jours.
Ô grand public !
Là où Gran Turismo Sport pourra diviser, c’est probablement avec son gameplay. Si l’impression de vitesse est excellente, on sent tout de même que les développeurs ont prôné l’approche grand public. Si la conduite peut se montrer exigeante lorsque toutes les aides sont désactivées, on est très très loin d’un Project Cars 2. Le pilotage est ultra accessible et se montre même grisant mais il ne plaira pas à tout le monde. Il n’en reste pas moins terriblement efficace, surtout lors de l’utilisation d’un volant. Le FFB est convaincant et ravira celles et ceux qui se sont passés de manette (pas de crainte, le gameplay au pad est très bon) depuis longtemps. Malgré ce feeling tourné vers les novices, il ne faudra pas faire n’importe quoi. Le jeu intègre en effet un système de pénalités où chaque incartade se paye cash. Ne vous amusez donc pas à rentrer de plein fouet dans un concurrent ou à couper ouvertement un virage, la pénalité n’en sera que plus importante. Et si vous aimez jouer les bad boys, sachez que vos méfaits routiers peuvent se traduire par l’interdiction d’accéder à certaines compétitions. Oui, ça ne rigole pas.
Photo-réalisme
Depuis le 23 décembre 1997 (date de la sortie nippone du premier GT sur PlayStation), la série de Yamauchi a toujours dégagé une patte artistique se rapprochant du photo-réalisme. À l’époque, les joueurs se sont pris une turbo-claque et cet aspect n’a jamais été pris à l’emporte-pièce. Ainsi, et même si le garage ne dépasse pas les 170 véhicules, la modélisation des bolides s’avère juste bluffante. La reproduction des circuits s’avère également étonnante et je dois bien avouer m’être cru un instant en plein Tokyo lors des passages sous les tunnels de la fourmilière japonaise. Cela m’a même rappelé des titres comme les Tokyo Highway Challenge ou les Initial D. À mon sens, il est inutile de comparer Forza 7 à ce GT, les philosophies artistiques ne sont clairement pas les mêmes. Le titre de Microsoft aime le côté feu d’artifice avec des effets dans tous les sens et des couleurs qui pètent à l’écran. Gran Turismo, lui, se veut plus sobre, plus proche de ce que l’on peut voir dans la vie de tous les jours. Et les deux concurrents sont, il faut bien dire, magnifiques dans leur approche respective. Certes, c’est dommage que le jeu de Sony ne propose aucun dégât, ça aurait donné encore plus de corps au très complet mode photo mais ce n’est clairement pas rédhibitoire.
Si l’on peut le prendre comme un épisode de transition, Gran Turismo Sport n’est pas pour autant une déception. Très bien fini, le jeu affiche une animation d’une fluidité remarquable et mise sur la qualité avant la quantité. Certes, les 17 circuits (dont du rallye et des ovales) peuvent paraître un peu faibles en nombre mais le titre se rattrape avec son excellent multijoueur et sa réalisation globale. Gran Turismo oblige, l’exigence est de mise mais un peu de recul suffit pour prendre conscience qu’on se trouve en face d’un épisode très solide.
Conclusion du rédacteur : TRÈS BON
Très différent de Forza Motorsport 7, Gran Turismo Sport n’en demeure pas moins un excellent cru. Tourné vers le online, il délaisse certains aspects qui ont fait le succès de la licence mais se montre remarquable sur bien des points (graphismes, menus, gameplay, orientation multijoueur…). Beau, prenant et immersif, il aurait probablement gagné à être plus complet et accentue son retard en matière de collisions et de météo dynamique. Malgré cela, le jeu de Kazunori Yamauchi offre des sensations exquises et assume totalement cette direction prise par la série. Et à moins de vouloir se taper une myriade de clones, le changement a du bon !
Points positifs :
Interface excellente et fonctionnelle
Graphiquement réussi
L’amour des bagnoles avec un grand A
Pilotage grisant
Les novices ne sont pas oubliés
Un bonheur au volant
Bande son agréable et bruitages en nette amélioration
Le online peaufiné à l’extrême
Mode 2 joueurs en écran splitté
Mode VR…
Points négatifs :
… mais celui-ci est limité à un concurrent par course
Mode solo pauvre
Pas de dégâts, ni météo dynamique
Manque de circuits
Garage pas assez complet
Une approche qui ne plaira pas à tout le monde
Éditeur : Sony Interactive Entertainment – Développeur : Polyphony Digital – Genre : Course – Sortie : 18 octobre 2017 – Plateformes : PS4
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