C’est la saison des avant-premières sur Joypad ! Après World of Warcraft et Kingsglaive : Final Fantasy XV, nous avons eu l’honneur d’être conviés à la projection du film Virtual Revolution. Vous le savez, nous avons une affinité particulière avec l’univers indépendant. Cette petite production est justement l’occasion de mélanger les deux passions premières de tout geek qui se respecte, le jeu vidéo et le cinéma, en mode indie. Il y a un an, nous avions déjà eu l’occasion d’interviewer le réalisateur Guy-Roger Duvert et l’actrice Melissa Mars, durant la phase de post-production de l’œuvre. Après un succès retentissant aux Etats-Unis et dans plusieurs festivals (en remportant de nombreux prix), le film arrive enfin chez nous (seulement à Paris pour le moment). Afin de vous faire partager nos impressions sur ce long métrage, voici l’avis de la grande Aurèlie Knosp, de Julien Lecomte et de moi-même. À noter que le film est uniquement disponible en VOSTFR, inutile de vous déplacer si vous êtes un cancre en anglais ou en lecture de sous-titres.
Virtual Revolution nous entraîne dans un Paris futuriste, en 2047. Une révolution d’un genre particulier a éclaté partout dans le monde, sans la moindre goutte de sang (ou presque). Le jeu vidéo a continué son émancipation et la réalité virtuelle a envahi tous les foyers. Progressivement, la société a adopté un nouveau mode de vie, qui plonge la population à jouer 24h/24. Le cerveau ne pouvant plus faire la différence entre le réel et la fantaisie, trois classes sociales ont émergé. Les connectés (qui ne sortent même plus de chez eux), les hybrides (qui oscillent entre les deux) et les 25% restant qui s’opposent farouchement à cette technologie. Le personnage principal du film, Nash Trenton (incarné par Mike Dopud), est un agent qui se salit les mains, au service d’une des compagnies qui produisent ces jeux. Il est mandaté pour enquêter sur une série d’attentats meurtrier, orchestrée par un mystérieux groupuscule terroriste. Son investigation va bien évidemment, le conduire bien plus loin qu’il ne le pense…
Nash fait partie de la classe des hybrides, il a un passé assez chaotique et tente de se construire une vie dans le jeu Fantasy-médiéval qu’il affectionne. Ce personnage est parfaitement moulé pour l’acteur Mike Dopud, grand habitué de la science-fiction. Celui-ci le précise lui-même, dans cette vidéo interview :
On ne peut qu’être d’accord avec ces propos, le charisme du personnage et ses répliques teintées d’humour sont un régal pour le spectateur. Le casting est également composé d’autres acteurs de renom, tels que Jane Badler (la grande méchante de la série V, version année 80), de Melissa Mars ou encore Jochen Hägele. Ce dernier semble s’inspirer du jeu d’acteur d’un certain Gary Oldman, dans ces plus grands rôles de méchant (Léon en tête). Dans l’ensemble, le casting est très réussi et n’a absolument pas à rougir des grosses productions. Il en va de même concernant les effets spéciaux (Julien détaille ce point ci-dessous), et de la musique. Guy Roger Duvert étant déjà très reconnu dans le milieu en tant que compositeur, il était normal qu’il se charge de la musique de son film. Le résultat est tout simplement exceptionnel. En grande partie inspiré du travail de Vangelis dans Blade Runner (ou de la bande-son de Deus Ex Human Revolution), l’ambiance musicale nous immerge totalement dans l’univers.
Conclusion du rédacteur : Excellent !
C’est simple, si le style du film vous donne envie, ne cherchez pas plus loin, allez le voir ! Celui-ci propose une réflexion très pertinente sur la réalité virtuelle, et ne s’arrête pas aux clichés faciles. Vous ne pouvez pas sortir de la séance sans vous poser de nombreuses questions, ou débattre un long moment sur le sujet avec vos amis. En résumé, vous vous attendez à visionner une petite production indépendante sans prétention, mais Virtual Revolution est en réalité, beaucoup plus que ça. Pour le moment, le film est seulement disponible dans deux salles parisiennes (le Lucernaire et le Publicis), et sort le 12 octobre. Il ne tient qu’à vous d’en parler, afin qu’il reçoive le succès qu’il mérite. Pour finir (avant de vous laisser en compagnie de Julien, puis d’Aurélie), vous pouvez acquérir la bande son du film sur Amazon.
Avis de Julien Lecomte :
Avant la projection :
Je savais que j’allais voir un film d’une heure et demie, réalisé par Guy-Roger Duvert (alors inconnu pour moi) et qu’il s’agissait d’une œuvre franco/américaine indépendante, mélangeant les genres science-fiction, fantasy et polar. Je n’en savais pas beaucoup plus et pour être honnête, j’ai pensé qu’une production indépendante de SF (malgré un synopsis qui me parle), n’allait pas m’emballer (on y va, et on verra bien)…
De plus, avec mes références d’otaku, j’ai tout de suite pensé à Akira, Ghost in the shell, Yureka… et au très célèbre Sword Art Online (notamment l’arc Phantom Bullet).
SAO étant un véritable phénomène, il connait actuellement moult déclinaisons :
– un roman de Reki Kawahara lancé au 2009 (comportant aujourd’hui 18 tomes)
– une adaptation en animé, qui cartonne dans le monde entier avec actuellement 2 saisons (49 épisodes)
– un film d’animation qui arrive le 18 février 2017 (une sortie simultanée dans le monde entier vient tout juste d’être annoncée)
– une adaptation en série live américaine est en cours de production (par la société Skydance Television en collaboration avec l’éditeur japonais Kadowawa Corp)
– déjà 3 jeux vidéo parus (et le 4e « Hollow Realization » débarque sur PS4 le 8 novembre)
– et 2 autres en préparation pour 2017 (Memory defrag sur mobile et un crossover SAO VS ACCEL WORLD (autre roman de Reki KAwahara) sur ps4/vita)
– un VRMMORPG (Virtual Reality Massively Multiplayer Online Role Playing Game) en cours de développement par IBM (Sword Art Online : The Beginning) (208 bêta-testeurs ont pu essayer une démo en mars au Japon)
– un autre projet de réalité virtuelle par Skydance Television serait également en préparation
Bref, au milieu de tout ça et des nombreux autres animés qui surfent sur la mode de la réalité virtuelle, j’avoue avoir eu un peu peur pour Virtual Revolution. Pensant très fort qu’il allait lui falloir de réelles qualités pour ne pas passer inaperçu et se noyer dans cette masse (sachant que lui aussi, va avoir droit à une série télé, une bande dessinée et un jeu de société).
Le film :
L’histoire de Virtual Revolution est un vrai scénario de science-fiction d’anticipation et il vient clairement apporter une réflexion autour du futur de notre société, avec l’apparition de la réalité virtuelle. En effet, le film amène quelques réflexions et différents points de vue sur le sujet. Guy-Roger Duvert a eu la bonne idée de ne pas apporter directement une réponse claire et définie, mais il oblige le spectateur à forger sa propre opinion.
Abordons l’aspect virtuel du film, qui se décline en deux jeux (appelés « verses ») : un monde médiéval (du genre MMORPG), ainsi qu’un monde post apocalyptique (du genre MMOFPS). Nous retrouvons bien distinctement les codes de ses deux univers, avec chacun leur pâte graphique : un monde assez coloré et verdoyant pour le RPG et un monde sombre et en désuétude pour le FPS. Personnellement, je trouve que le monde du RPG est sous-exploité, alors qu’il a un potentiel aussi fort que le FPS (un peu dommage à mon goût…).
Visuellement, le film regorge d’effets spéciaux dans chacun des univers et ils sont magnifiquement réussis. N’oublions pas que nous ne sommes pas dans un blockbuster américain, même s’il n’aurait pas à rougir en le comparant à certains d’entre eux. Seuls deux ou trois effets sont un peu moins réussis, mais dans l’ensemble cela reste du haut niveau.
Virtual Revolution alterne les scènes d’action avec celles de dialogue/réflexion, dans un rythme séquencé me faisant clairement penser aux animés Japonais. Certains réfractaires ou non initié du genre, trouveront donc peut-être les phases plus calmes un peu longues, mais pour la majorité, cela ne devrait pas poser de soucis.
Au niveau du jeu des acteurs, je n’ai pas grand-chose à dire, chacun joue son rôle plutôt bien. Petite mention spéciale à faire pour Maximilien Poullein (qui joue le rôle de Morel), un hacker un peu déluré/décalé (jouant avec les codes et les stéréotypes, mais sans tomber dans la caricature), j’ai particulièrement aimé son interprétation et ses gimmicks.
Conclusion du rédacteur : Très bon !
Un grand bravo à toute l’équipe, la standing ovation en fin de représentation démontre bien le potentiel du film. On sent que Guy-Roger Duvert est un vrai passionné de jeu vidéo et de jeu de rôle. Il sait de quoi il parle et nous partage une bien belle réflexion sur la réalité virtuelle. De plus, on voit bien qu’il est entouré d’une équipe de passionnés et de personnes talentueuses. Au final, j’attends avec impatience de voir la suite, notamment avec la série et le jeu de société. Et comme précisé plus haut, j’espère juste que l’effet de mode et l’overdose du genre ne viendront pas tout gâcher…
Voici deux clichés du prototype du jeu de société :
Avis d’Aurèlie Knosp :
Vous êtes en 2047, la révolution virtuelle a eu lieu, pour le meilleur ou pour le pire ?
Virtual Revolution vous plonge dans un monde futuriste, où les aliens ne sont pas encore arrivés, ni même les robots à l’IA déglinguée. Non c’est mieux, ou plus tragique que ça (barrer la mention inutile). Les humains “connectés” ont trouvé un moyen de s’échapper dans des mondes virtuels et merveilleux. Imaginez un peu le monde dévasté de Wall-E et ses humains perdus dans l’espace (au détriment de la Terre), qui rencontrerait les univers fantastiques d’Avatar.
Le scénario de Virtual Revolution n’aborde donc pas un thème des plus originaux. Par contre, la manière dont le réalisateur traite le sujet est assez particulière et intéressante. En effet, même si les connectés sont décrits comme des êtres amorphes, ils ne sont pas pour autant privés de libre arbitre.
Au contraire, c’est peut-être un choix de vouloir fuir la réalité, afin de vivre des histoires tout aussi réelles, dans un monde imaginaire. Le film oscille ainsi entre clichés sur les joueurs et expériences scientifiques sur la notion du bonheur. Sans spoiler, la conclusion pourra autant satisfaire que laisser sceptique, en fonction de la valeur qu’on donne au virtuel.
La direction artistique de Virtual Revolution est plutôt réussie. Certains plans rappellent bien l’œuvre dont il s’inspire majoritairement, Blade Runer. Rues sales et insalubres, ciel assombri, passages étroits qui fourmillent et ambiance lourde et inquiétante décrivent le monde réel.
D’autres visuels rappelleront sans aucun doute Deus Ex et ces humains qui se mêlent aux nouvelles technologies. Les couleurs et les lumières rappellent aussi les tons chauds des intérieurs feutrés. L’extérieur n’en est que plus froid et inquiétant. Par ailleurs, les mondes virtuels sont plus proches de la nature, des combats à l’épée, d’immenses forêts et même des dragons.
Ainsi, Virtual Revolution manque peut-être d’une identité propre et assumée. Les références sont trop nombreuses au détriment d’une réelle identification. De même, les effets spéciaux sont parfois inégaux. Certains plans font plus penser à une série plutôt qu’à un long métrage. De même, le nombre de personnages et leurs intrigues laissent parfois un sentiment de confusion. D’autant plus que les intrigues du monde réel sont imbriquées dans le monde virtuel, et inversement…
Ce film est plagié d’un bouquin publié en 2001 chez Publibook: Génération 0
Comme ne l’a jamais dit Napoléon : « pourquoi justifier par la malice ce qui peut s’expliquer par la méconnaissance ? »
Je n’ai pas lu « Génération 0 », mais la SF est un domaine extrêmement prolifique, abordant en boucle, souvent, de très nombreux sujets. Il est fortement probable que le scénariste n’ait pas eu connaissance de votre référence et ait abordé de son point de vue, partagé avec l’auteur de votre livre, les mêmes thèmes et les mêmes situations. De là a directement accuser le scénariste d’avoir plagier le livre, c’est faire preuve d’un jugement hâtif et déplacé, ne croyez-vous pas ? Par ailleurs un livre et un film sont deux media différents qui peuvent traiter du même sujet, de la même façon, mais pour un public différent. Et si vous souhaitiez rendre hommage au livre, votre formulation n’est pas la plus respectable.
Pourquoi accuser le film et son auteur de plagiaires sans connaître les motivations initiales du film ? Peut-être même est-ce volontaire : avez-vous lu le générique et les crédits jusqu’au bout pour garantir que ce n’est pas un clin d’œil assumé à cette œuvre ?
Qu’avez-vous pensé du film en lui-même ? Ça réalisation, son contenu, son intérêt ? Le comparer directement avec le livre dont vous parlez est sans doute plus constructif qu’une phrase laconique, agressive et hautaine, ne pensez-vous pas ?
Enfin, il est aussi intéressant de passer outre les similitudes scénaristiques ou scéniques de ces deux œuvres pour vous attarder sur l’intérêt qu’il puisse y avoir dans un film indépendant, français – c’est très rare de la SF –, qui reprendrait les thème somme toute classique de la SF.
Pour moi, le film est une réussite, même s’il use de poncif du genre auquel il appartient. Ce n’est pas une révolution cinématographique, mais c’est une production riche qui ouvre une voie jusqu’ici délaissée par le cinéma français (en dehors de rare super-productions). En cela, copie, plagiat ou nouveauté, ce film reste une belle œuvre.