MISE À JOUR DU SAMEDI
Nous vous proposons chaque semaine de participer aux débats animés qui sévissent dans la rédaction : chaque jour, l’un des membres de Joypad va poser son avis sur la question de la semaine, mais vous êtes très largement encouragés à participer à notre débat en vous fendant de commentaires constructifs, ou tout simplement en nous soutenant les uns les autres sur nos points de vue.
Plus de 300 000 visiteurs auraient arpenté les allées du centre des expositions de la Porte de Versailles lors de la Paris Games Week qui se tenait la semaine dernière. Un chiffre triomphal qui semble aussi fiable que celui d’une manifestation de syndicats. Néanmoins, année après année, il est indéniable que le salon gagne des visiteurs à défaut d’être de plus en plus intéressant. Mieux, cette année, il a même été marqué par sa première conférence constructeur, à savoir Sony, qui a été plus avare en annonces qu’en ballons sur son stand. Du coup, se pose la question de l’avenir de cette manifestation. Va-t-elle continuer à grandir ou sera-t-elle un gros ballon rempli de vide à jamais ? Le débat est ouvert !:
La Paris Games Week peut-elle devenir un salon majeur ?
Lundi : Le point de vue de Ghislain
Actuellement sur les écrans, il y a un film dont les critiques non censurées s’accordent à dire que c’est une insulte au cinéma, fut-il destiné au prime time de la première chaîne nationale. S’appuyant sur un « comique pour jeunes » à la mode, ce film cartonne et comme il est de coutume de dire, rencontre son public. Preuve s’il en est qu’il ne faut jamais confondre quantité et qualité. La comparaison avec la PGW est évidente. Je mettrais ma main à couper que les visiteurs sont les mêmes et à défaut de Kev Adams ils auront fait le siège du stand de Cyprien et son triste complice publicitaire.
La PGW n’est qu’un showroom géant des nouveautés de Noël. Et elle le fait sans doute très bien vu l’affluence. Alors oui, on peut s’énerver face à des files d’attentes interminables pour jouer à des jeux dont certains sont sortis depuis plusieurs semaines. On peut désespérer sur la foire d’empoigne qui s’empare de la foule pour récupérer un porte clé jeté dans la masse comme un os au milieu d’une cage de fauves. On peut trouver les allées trop petites, les prix des boutiques trop chères et les jolies hôtesses trop, ou pas assez nombreuses. N’empêche que ça marche. Mais ça n’ira pas plus loin.
La première raison, est très bête mais pas souvent mise en avant : c’est un salon à destination du public. On ne le mentionne pas assez, mais l’E3, premier salon mondial, n’est pas ouvert au public ! Il est réservé aux professionnels et n’aura donc jamais 300 000 visiteurs à afficher pour comparer son kékémètre avec la PGW.
La seconde raison est sa date. En novembre, les éditeurs veulent écouler leurs jeux sous le sapin. D’ailleurs, hormis sur le stand du Made in France, les petits ne sont pas vraiment représentés sur le salon.
La troisième raison, grâce à laquelle je vais me faire plein d’amis, c’est le public. Désolé PGW, mais beaucoup de tes visiteurs ne savent pas se tenir. Pour avoir été exposant il y a quelques années, je n’ai jamais vu autant d’impolitesse, de fauche et d’incivisme aussi bien concentrés dans un même endroit. Par extension, le public est quand même majoritairement plus intéressé par Call of Duty sur PS4 que par un obscur jeu japonais ou une simulation sur PC. Vous comprendrez donc que les développeurs ne fassent pas le déplacement.
Ma réponse est OUI mais… La PGW est déjà un grand salon, mais un salon consumer. Un catalogue d’achat qui aurait pris la forme de stands, d’allées remplies de vilains garnements, de sono démentielle et de bubble tea vraiment pas bon (expérience vécue). Elle ne peut donc pas rivaliser avec l’E3, la Gamescom ou le Tokyo Game Show car elle ne boxe pas tout à fait dans la même catégorie.
Mardi : Le point de vue de Régis
N’étant pas sur place ce week-end, je n’ai qu’un oeil extérieur au salon. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que ça fait franchement flipper. Je sais que je ne fais absolument pas partie de cette génération (j’ai 34 ans) mais je suis complètement dépassé par le phénomène des Youtubers. D’après certains échos, c’était la course au Cyprien et Squeezie ce week – surtout que ce dernier est passé l’autre jour dans TPMP – mais ils étaient loin d’être les seuls que les gamins de tout âge venaient voir. Bref, dépassé ma bonne dame ! Dépassé également par le foutoir apparent : le salon n’est clairement pas adapté pour accueillir autant de monde. Sur les photos, c’est une véritable marée humaine et je n’aimerais vraiment pas me trouver au milieu. Et que dire de l’attitude des gens ? L’incivilité règne et il suffit de se pencher sur les photos avant et après le salon pour se rendre compte du carnage. Ajoutez à cela des décibels totalement insupportables et vous comprendrez que je ne suis vraiment pas déçu de ne pas y avoir foutu les pieds. Et pourtant, j’ai beaucoup de monde et d’amis/collègues à voir mais en l’état, c’est hors de question de prendre un billet pour Paris et me taper une telle farce.
L’autre problème vient des jeux. Il n’y a quand même pas beaucoup d’exclus à se foutre sous la dent. Ainsi, même si la queue était moins longue que l’an passé, on a vu des centaines de mômes courir comme des crevards pour tester le dernier Call of Duty. Un jeu qui sort le 6 novembre, soit moins d’une semaine après le week-end de la PGW. Tout va bien… mais ça fait un peu flipper quand même. Ce côté ultra-commercial, très peu pour moi. Je dis d’ailleurs la même chose de la Japan Expo. C’est peut-être ma vision de provincial mais c’est ainsi.
Oui et non. Le Paris Games Week est un salon majeur mais il matérialise à lui seul les errances de la société et de la mentalité françaises. Le respect a définitivement disparu. Bien que plus vaste que l’an passé, le salon n’est pas encore adapté pour recevoir une telle marée humaine. Même la salle de la conf’ de Sony est environ deux fois plus petite que celle de Cologne. J’attends donc de voir mais il y a de fortes chances pour que la conf’ de Sony, l’an prochain, ait lieu non pas en France mais en Allemagne. Pour l’heure, le PGW grimpe en popularité mondiale mais il a encore bien du chemin à parcourir pour rivaliser avec les plus grands. Un salon est censé être un moment agréable, que l’on peut découvrir en famille. En l’état, il est hors de question que je trimballe ma femme et mes deux enfants dans un endroit pareil.
Jeudi : Le point de vue d’Aurélie
Je ne comprends pas pourquoi on hurle autant sur la Paris Games Week. Alors oui, il y a beaucoup de monde. Et certains ne manquent pas de culot pour avoir un joli bout de papier dédicacé par la nouvelle coqueluche de Youtube ! Évidemment, les stands font parfois crier leurs décibels pour attirer le badaud en manque de sensation. La Paris Games Week fait (ou essaie de faire) dans le sensationnel. Mais tant mieux si des jeunes aiment la stimulation de se faire pousser pour atteindre le Saint graal d’attendre des heures pour jouer au dernier Call Of Duty. Honnêtement, c’est bien de voir des jeunes avec des paillettes dans les yeux quand on parle de leur journée à la Paris Games Week. Ensuite, c’est à nous, adultes, de faire le travail nécessaire pour leur ouvrir l’esprit sur d’autres jeux. D’expérience, je peux vous dire qu’un Bioshock, Uncharted, ou même Super Meat Boy et Crash peuvent faire des émules. Donc, c’est tout à notre avantage d’avoir un salon français qui attire de nouvelles générations de joueurs. Il suffit juste de pouvoir mieux les guider… Et c’est au moment de communiquer sur le salon qu’un travail est à faire ! À ce niveau, la Paris Games Week pourrait proposer à l’avenir plus de nouveautés et montrer moins de jeux déjà prévus pour le père Noël !
Surtout, il ne faut pas oublier que le salon est divisé en deux parties. De l’autre côté, nous avons l’espace jeunesse et le stand made in France. Ce dernier accueille pas moins de vingt jeux indépendants français qui méritent le coup d’œil. Plateforme, RPG, Shooter, jeu de rythme, de chant, de course, etc, difficile de ne pas trouver chaussure à son pied ! D’autant plus que les développeurs sont présents pour expliquer leur jeu et répondre à toutes les questions. Pouvoir partager leurs expériences est une aubaine pour ceux qui rêvent de travailler dans le jeu vidéo. À cela se rajoute de nombreuses écoles venues promouvoir leurs formations (souvent très bonnes) et les talents de demain. Quant à l’espace jeunesse, les familles peuvent s’y retrouver pour d’agréables moments intergénérationnels. Pour avoir travailler comme animatrice sur un jeu à grosse licence, je peux vous dire que c’est vraiment touchant quand un père aide son enfant à tenir une manette. Malheureusement les organisateurs du Paris Games Week ne communiquent pas assez sur cet aspect !
Conclusion : La Paris Games Week pourrait devenir un acteur majeur parmi les salons du jeu vidéo. Malheureusement, la communication est centrée sur les gros titres déjà sortis qui iront sous le sapin. C’est triste de voir si peu d’informations sur la variété des jeux et des activités proposés par le salon et pourtant ça ne manque pas. Les organisateurs semblent ne se concentrer que sur la potentielle fortune qu’ils peuvent se faire sur le dos des parents (prix de l’entrée, des repas, nombreux magasins, attente interminable). Pourtant, je suis persuadée que la Paris Games Week (ne serait-ce que pour le lieu, la date, ses partenaires, etc) pourrait devenir un grand salon. Mais elle a sûrement une réputation à se refaire !
Vendredi : Le point de vue de John
Niveau national, Le Paris Games Week est un événement qui se veut incontournable. Hélas son organisation le rend dispensable de part le périple qu’il faut entreprendre pour un joueur lambda sans accès VIP ou Presse. Bien loin des bulles de champagne et des allées propres de l’avant première, le salon devient une véritable expédition lors de son ouverture au public. Les chiffres du SELL nous on fait croire à 307 000 visiteurs pour 60 000 m2 (167 000 en réalité). Quoi qu’il en soit, c’est énorme et ça fait bonne impression, mais sur place c’est une autre histoire. Le salon a temps à proposer, mais hélas tout le monde n’y aura pas accès et certains abandonneront rapidement.
Cet événement se veut majeur pour le jeu vidéo en France, mais il n’est pas pensé pour accueillir les innombrables visiteurs de l’hexagone, uniquement ceux de Paris et sa proches banlieue. Alors imaginez si l’Europe toute entière débarque, ce qui était en partie le cas cette année, avec de nombreux médias frontaliers ayant fait le déplacement. Le choix de Sony, pour y poser sa conférence européenne est une nouvelle preuve de l’engouement du salon par les professionnels. Square Enix a également tenu un Media Day, ainsi qu’officialiser le jeu NieR : Automata.
Cet événement a tout pour devenir un gros salon français et se faire une place parmi les grands comme la GamesCom, la PAX (que ce soit aux US ou en Australie), ou encore le Tokyo Game Show. Mais faut-il encore que les organisateurs prennent les dispositions nécessaires pour être à la hauteur de leurs ambitions.
Samedi : Le point de vue de Nicolas
Le PGW est destiné à un public bien particulier. Je suis d’accord avec le point de vue d’Aurélie, s’ils sont contents comme ça, pourquoi changer. C’est toujours le même problème avec le système de consommation, tant que les gens achètent ce qu’on leur propose, aucun effort ne sera réalisé. Quand je vois ces photos de marée humaine entassée devant une scène, je ne peux m’empêcher de penser aux organisateurs du SELL qui regarde d’en haut, des euros pleins les yeux.
Je ne sais pas ce qu’il advient de la recette des entrées du salon, mais aux vues des chiffres annoncés par le SELL (gonflés à l’hormone de taureau), une partie doit bien tomber dans leur poche. On verra ce qui se passe l’année prochaine, notamment si l’événement s’organise sur une surface plus grande. Si c’est toujours pareil, je resterais sur mon opinion. Il n’y a aucun respect pour le public qui paie son entrée sans sourcilier. Ce salon n’a que pour objectif de générer de l’argent sous couvert de promotion de l’industrie…