Metal Gear Solid V – The Phantom Pain
Reg'
Gameplay d'une richesse inouïe
Le charisme des personnages
La performance de Kiefer Sutherland
Des environnements dépaysants
La fibre Metal Gear Solid
La bande son (sélections de chansons des années 80 et musiques inédites)
Une réalisation quasi organique
Le dernier MGS ?
Missions répétitives
Narration en retrait
L'intérêt du scénario se trouve dans les cassettes
Un mois. Il aura fallu quasiment un mois avant que Joypad.fr ne daigne proposer son test de Metal Gear Solid V : The Phantom Pain. À l’inverse des autres productions de ces derniers mois, ce titre n’est clairement pas un jeu comme les autres. En plus d’être un MGS qui casse les habitudes de la série, il cristallise la rupture entre Hideo Kojima et Konami. S’attaquer à un tel mastodonte peut s’avérer très casse-gueule, tant le feeling peut être différent d’un joueur à un autre. MGS dans l’univers du jeu vidéo, c’est une véritable institution. Un phénomène à l’avenir incertain, mais qui se devait de livrer un baroud d’honneur d’exception. Long, prenant, scotchant… il est pourtant loin d’être parfait et on en vient même à se demander : est-ce un vrai Metal Gear Solid ?
Lors de la première heure trente, c’est une certitude : MGS V est bel et bien un titre dans la lignée des précédents épisodes. Que ce soit dans la présentation des personnages, le dynamisme de la focale, les évènements… l’aura de la saga est plus que palpable. Et pourtant, oui pourtant… cette introduction peine à surprendre, comme si elle était un peu catapultée. Hideo Kojima a voulu nous faire ressentir le quasi immobilisme du corps de Snake, mais il manque quelque chose. C’est lourd et presque sans aucun gameplay pendant de très longues minutes, limite indigeste. Bien sûr, ça finit par décoller mais c’est à se demander si cette phase n’a pas été construite comme une sorte de test pour le Fox Engine, le fameux moteur maison de Kojima Productions. En clair, je n’ai pas vraiment aimé cette intro, que je trouve bien moins réussie que celles des précédents volets. Elle est lente, trop lente et on finit par décrocher.
Tous azimuts
Heureusement, l’intérêt de Metal Gear Solid V se trouve ailleurs. Si le jeu est présenté comme un univers en monde ouvert, ce n’est pas vraiment le cas. Il s’agit plus de grandes zones qui sont reliées par des villages, des campements ou des bases. On est bien loin du gigantisme d’un GTA V, dont Kojima a dit tant de bien. Néanmoins, l’impression de grandeur est là et la découverte de Mother Base ne peut laisser personne indifférent. Sous ce nom un peu barbare se cache le Q.G des Diamond Dogs, une unité dissoute qui ne demande qu’à retrouver l’aura des premiers jours. Avec Big Boss en chef absolu, épaulé par Miller et Ocelot, l’organisation indépendante peut compter sur des hommes d’expérience. La Mother Base est une plateforme pétrolière qui regroupe plusieurs sections : R&D, Renseignements, Unité médicale, Poste de Commandement, Unité de combat ou encore Développement de la base. En clair, il s’agit d’un hub vous permettant de paramétrer votre inventaire en fonction de la mission à venir. Grâce à cette planque, Snake pourra compter sur un équipement toujours plus performant, des informations ultra détaillées, etc. Tout se construit autour de la Mother Base, elle est un peu comme une chambre gravitationnelle des objectifs à atteindre.
Pôle Emploi
Et bien évidemment, pour mener à bien le développement de ce Q.G, il faut des hommes. Et c’est là que le véritable jeu entre en action. Durant chaque mission, Snake dispose de ballons qu’il peut accrocher à des ennemis (blessés, endormis, assommés, etc.) pour les envoyer hélico (ha ha) presto à la Mother Base. Chaque individu dispose de ses propres compétences et c’est pourquoi il ne faut pas se jeter sur le premier soldat venu. Au-delà des hommes de main, la Mother Base a également besoin de métal, de ressources biologiques ou encore de carburant (qu’il faudra récupérer lors des missions). Mais le nerf de la guerre, comme partout ailleurs, c’est encore et toujours le pognon ! Les ressources financières sont indispensables à l’amélioration de vos conditions de soldat. Pour en gagner, il faut bien sûr atteindre les objectifs (plusieurs par missions, certains indispensables, d’autres secondaires) et vous pouvez même monter des unités afin de les envoyer en mission (en vous assurant que leurs compétences soient à même de réussir la mssion). La Mother Base, en cela, est une excellente idée. Il y a pas mal de petites choses à y faire, même si la grandeur de la plateforme fait qu’on a une impression de vide très rapidement. Les ballons vous serviront à exfiltrer des soldats mais également des scientifiques (plusieurs missions ont pour objectif d’en sauver) ou encore, et là c’est plus amusant, des animaux. Eh oui, pour que Diamond Dogs retrouve son lustre d’antan, Snake et sa bande ne reculent devant rien.
On the road again
Et donc, une fois en mission, ça donne quoi ? Assurément, c’est l’une des plus grandes réussites de cette dernière année. Metal Gear Solid V : The Phantom Pain est un jeu assez incroyable en terme de liberté. Si Ocelot vous donne quelques conseils pour vos premiers pas, vous êtes véritablement lâchés en pleine nature. Au départ, vos escapades se feront à pied ou à cheval, avant d’obtenir d’autres moyens de locomotion par la suite (vous pouvez piquer les camions ou les jeeps). Entre chaque mission, l’hélicoptère est votre moyen le plus sûr pour vous tirer d’un mauvais pas ou vous déposer dans une zone de mission. S’il en a l’apparence, MGS V n’a rien d’un véritable monde ouvert. Une fois la mission lancée, le jeu vous interpelle dès que vous vous éloignez. Vous avez bien sûr tout le loisir d’abandonner la mission et d’aller visiter la carte en son entier, mais ça sera au détriment des objectifs à atteindre. Par ailleurs, si on ne peut s’empêcher de souligner la qualité du level design et de l’aspect quai photo-organique des lieux, on ne peut s’empêcher de tiquer en s’apercevant que les zones vides, sans rien à faire, sont extrêmement nombreuses. Cette sensation de vide, on la craignait depuis un moment, et c’est quelque chose qui se ressent assez régulièrement dans MGS V. Et vu le temps qu’on passe à marcher, courir ou foncer à cheval, on ne peut que le remarquer. Kojima a toutefois eu la bonne idée de proposer deux environnements, aux paysages forts détaillés et variés. Des montagnes de l’Afghanistan, on passe aux forêts humides de l’Angola. Le dépaysement est total et ça fait vraiment du bien. Vous vous dites sûrement que le jeu enchaîne les problèmes, mais c’est oublier la qualité du gameplay et la liberté incroyable offerte au joueur.
Un Kojima, mille possibilités
De très loin, Metal Gear Solid V est celui qui dispose du gameplay le plus abouti. De la même manière, c’est le MGS qui pousse le joueur à expérimenter au maximum. L’improvisation est quasi totale et c’est ce qui fait la grande force de cette aventure. En fonction des moyens que vous avez à disposition, votre approche sera totalement différente. S’il est tout à fait possible de foncer dans le tas, au risque de vous faire liquider dans la minute qui suit, privilégier l’infiltration est la meilleure des solutions. Et surtout la plus grisante. Au départ, vous vous coltinez des petits camps ou bases et la difficulté reste limitée, mais dès lors que la mission s’intéresse à des complexes de grande taille, c’est une autre paire de manches. La première chose à faire est d’analyser les mouvements ennemis et surtout de repérer, à l’aide des jumelles à détection, la présence de chaque soldat. Ensuite, c’est à vous de choisir l’approche. Vous pouvez y aller à coups de sniper, de pistolet tranquillisant, de frappes aériennes (vous pouvez les commander à distance, très pratique dans certaines situations). Vous pouvez faire déféquer votre cheval pour que les véhicules se crashent comme des… ben merdes, justement. Vous pouvez appeler votre hélico, vous mettre à la sulfateuse et dégommer tout ce qui passe à portée de viseur. Vous pouvez aussi vous faire accompagner de Quiet (un personnage aussi sexy qu’énigmatique) ou vous équiper d’un D-Walker mis au point par Emmerich (le père de Otacon). Si MGS V n’est pas un vrai monde ouvert, il est sans conteste l’un des plus grands bacs à sable jamais imaginés. Faites-vous plaisir, essayez, tester les approches, expérimenter… c’est juste incroyable de cohérence ! D’ailleurs, l’intelligence artificielle est quand même sacrément performante. Si elle n’évite pas quelques couacs, elle est largement supérieure à la moyenne des productions actuelles.
Play
Parmi tous les éléments à récupérer durant les missions, les cassettes sont absolument (et j’insiste sur ce mot) INDISPENSABLES. Sans cette cassette, vous passerez totalement à côté de l’intrigue générale, vous passerez totalement à côté du « quatrième mur » à la Kojima, vous passerez totalement à côté de la profondeur des personnages… Ces cassettes, c’est un peu comme si le livre de MGS s’ouvrait à vous, en vous donnant toutes les clés de l’intrigue de ce MGS V… et de la saga au global. Ces cassettes sont une claque ! Au-delà des dialogues enregistrées, certaines cassettes contiennent des musiques cultes (la bande son de ce MGS est fantastique, que ce soit dans les thèmes inédits ou dans les chansons sélectionnées par Kojima) et il n’est pas rare de se farcir une mission difficile pour simplement récupérer ne serait-ce qu’un Take on Me de A-ha. Maintenant, il faut bien se rendre compte d’une chose : beaucoup de joueurs passeront totalement à côté des cassettes (car ils ne veulent pas s’emmerder avec des dialogues enregistrés) et c’est peut-être une erreur de n’avoir pas intensifié le rythme global du jeu et d’avoir limité les cinématiques. Oui, certains préfèrent que ces séquences soient plus courtes, mais on perd un peu le sel de la série avec MGS V. La narration et la mise en scène étaient les points forts des précédents opus. Clairement, avec ce cinquième volet, ces deux axes sont en retrait. La mise en scène est toujours remarquable, mais elle est plus « intimiste ». Et ça ne va pas plaire à tout le monde…
La fin qui n’en est pas une
Metal Gear Solid V, s’il est indéniablement répétitif, est pourtant un vrai régal à parcourir. Et comme on pouvait s’y attendre, Hideo Kojima nous a réservé une « surprise ». Ou même plusieurs, mais on n’en dira pas plus. Ce qui est sûr, c’est que le jeu est loin d’être terminé lorsqu’apparaît le générique de fin. L’aventure ouvre un chapitre 2, qui ressemble à un copier-coller du premier chapitre, mais qui n’en est pas un. Il est indispensable de ne pas négliger ce chapitre, sous peine de passer à côté d’une grande partie de la richesse de ce MGS. Mais on ressent tout de même que le développement a été rushé à la fin. Les relations entre Kojima et Konami ont causé beaucoup de soucis aux concepteurs et il est évident que MGS V n’a pas été terminé comme il devait l’être. Il faut aussi souligner que beaucoup risquent de tiquer en voyant apparaître le nom de Hideo Kojima des dizaines de fois durant l’aventure. C’est un personnage, tout comme Snake. Avec ce dernier MGS, le héros légendaire tire sa révérence de fort belle manière. Et pour glisser un mot sur la réalisation, sachez juste qu’elle défonce, à tous les niveaux, tout en restant d’une fluidité constante. Un jeu royal !