Remember who I am
C’est à Paris, dans le studio DontNod, que nous avons le plaisir de tester leur premier rejeton, Remember Me. Développé pendant plus de cinq ans, ce titre d’action aventure promet une expérience forte, dans les méandres de la mémoire.
Alors, cette preview nous offre les trois premières heures du jeu Remember Me. Celles-ci nous invitent à fuir, escalader, combattre avec le personnage de Nilin, et comprendre ses failles. C’est aussi cinq niveaux, pour découvrir Paris en 2084, et ses différentes strates. Alors que la première est submergée par les eaux, la dernière touche le ciel. Et l’ensemble est contrôlé par l’ère de la mémoire digitalisée et partagée.
Cet aperçu de « Néo-Paris » illustre la « touche artistique DontNod » et la vision futuriste des quatre fondateurs du studio, Aleksi Briclot, Alain Damasio, Oskar Guilbert, et Jean Maxime Moris. Le jeu Remember Me, produit par Capcom, prévu pour le 7 juin 2013, a donc réuni un beau panel de créatifs. Mais cela est-il suffisant pour faire un bon divertissement ?
En effet, avec ces premières heures de jeu, peut-on penser que Remember Me répond à nos attentes de joueurs ? Le gameplay semble-t-il autant recherché que la direction artistique et l’histoire ? Et surtout, pourquoi nous proposer de repartir avec un T-Shirt décoré d’un panda ?
Cette preview tente de répondre à ces louables interrogations. Que ce soit le panda, ou le personnage principal, ils marquent nos souvenirs : « My name is Nilin, this time, remember me !».
La dérive d’une amnésique
L’introduction de Remember Me nous emmène en 2084, au cœur de Néo-Paris. Un futur pas tant éloigné, puisque les souvenirs des citoyens sont sciemment partagés. Telle une page facebook ouverte, plusieurs personnes peuvent dérouler le fil de leur vie, et tout dévoiler.
Après cette courte mise en place de l’univers Remember Me, nous découvrons Nilin, une jeune femme qui se réveille d’un long coma, et a perdu tout repère .
Partiellement amnésique, elle est donc en danger. Heureusement, Edge, la « voix », nous guide, pour la sortir du milieu hostile des bas-fonds de Paris.
Ce démarage est sans grand risque, puisqu’il nous permet de découvrir l’univers, et les bases du gameplay, en même temps que le personnage. Heureusement, l’effet fonctionne. Alors que l’intrigue s’installe, le tutoriel pour courir, sauter, puis esquiver est efficace. Rien d’innovant, mais les commandes sont simples et intuitives.
D’autre part, d’abord nomé Adrift (à la dérive, en français), le projet Remember Me n’en a pas perdu l’essence. En effet, le passé de Nilin est effacé, et c’est à nous de la remettre dans le droit chemin. Nilin est une jeune femme forte, mais fragilisée par les failles de son passé. L’objectif est donc de découvrir qui elle pouvait être, avant de passer de chasseuse à chassée.
Pour cela, Remember Me est découpé en épisodes, où Edge nous rappelle une nouvelle mission. Nous pouvons supposer que l’ensemble du jeu restera segmenté de cette façon. Chaque épisode avec des phases d’action et de plateformes, un boss ou un nouveau pouvoir.
Par ailleurs, les personnages secondaires rencontrés, amis comme ennemis, ne sont que des faire-valoir à cette quête identitaire. L’histoire, parfois compliquée tant elle est fournie, est donc très linéaire. Mais ce n’est pas un mal. En effet, cette linéarité laisse plus de place au gameplay.
Jouer à combiner ses Pressens
Cette quête de souvenirs est aussi une base solide, pour un gameplay évolutif. Ainsi, les règles de combat de Remember Me, et les pouvoirs de Nilin suivent cette logique de souvenirs à reconstituer. Au fur et à mesure que nous combattons de nouveaux adversaires, Nilin redécouvre ses coups de chasseuse émérite.
Ces combinaisons de touches sont crées par l’accumulation de « pressens », soit des coups de catégories différentes. Au nombre de quatre, nous retrouvons les coups qui apportent de la santé, ceux qui boostent vos pouvoirs, ceux qui sont plus puissants, enfin ceux qui multiplient les dégâts. Ainsi, coups de poing et coups de pieds s’enchaînent avec les caractéristiques des pressens acquis.
Pour accéder à cette liste, nous devons passer par le menu pause, débloquer un des pressens, et l’ajouter dans un combo. Chaque pressen gagné se retire aussi bien qu’il se déplace, nous offrant de multiples combinaisons.
Ainsi, nous débloquons une liste de combos de plus en plus puissants, alors que le bestiaire est de plus en plus varié. Au début, nous découvrons les coups avec curiosité et amusement, mais la suite devient parfois lassante, car assez peu ergonomique. Espérons simplement que le jeu ne nous obligera pas a d’incessants allers-retours dans ce menu pour vaincre certains ennemis.
Quant à Nilin, sa prise en main est plutôt simple. Les coups se lancent facilement. Et garder le rythme, tout en esquivant, permet des enchaînements dynamiques sur vos ennemis.
Ces moments de joutes sont entrecoupés de phases de plateforme. Celles-ci ont l’air variées, même si les grimpettes du début sont un peu lassantes, nous finissons par y prendre goût. Certains moments de timing sont donc bien trouvés. Mais rien de très vertigineux en ce premier tiers d’aventure.
Monter est globalement très facile. Car les chutes sont rares, et il n’existe qu’un passage bien balisé. elle n’en rien de très reste pas moins plaisantes.
Par ailleurs, Nilin peut découvrir de nouveaux pouvoirs. Ce sont ses souvenirs de combats, Sensens débloqués après un affrontement un peu plus corsé. L’utilisation de ces Sensens permet ainsi de débloquer une roue de pouvoirs. Ceux-ci sont au nombre de cinq, rechargeables avec le temps, et permettent de nouveaux enchaînements plus dévastateurs. Rien de révolutionnaire, mais une variété de coups qui promet quelques sueurs froides à vos ennemis.
Cependant, une des utilisations les plus originales de cette maîtrise des souvenirs, est celle sur le temps révolu. En effet, Nilin peut traquer un personnage dans le passé, afin d’éviter pièges et ennemis cachés, d’ouvrir des portes scellées. Nous espérons juste que la suite du jeu renouvelle ces expériences.
Enfin, certains moments, très scryptés, permettent à Nilin de modifier en direct les souvenirs d’une personne. Ainsi, lorsque nous rencontrons un personnage dangereux pour la belle, nous faisons un tour dans sa mémoire, afin d’en effacer les éléments comprometteurs. Ces épisodes en noir et blanc, qui rappellent une vieille vidéo enregistrée, sont des plus intéressants. Avance rapide, retour en arrière, ralenti, pause… L’idée est de parcourir ce souvenir, jusqu’à tomber sur la faille qui sauvera la peau de Nilin. Très finement pensé, nous pouvons seulement nous demander, jusqu’où aller dans la destruction de la mémoire d’une personne, pour sauver sa peau.
Ainsi, le gameplay de Remember Me, et les interactions avec la mémoire, nous racontent une histoire. Il en va de même avec la direction artistique.
Une architecture qui raconte
Parcourir les niveaux se fait aussi de façon très linéaire. D’une part, dans le soucis de raconter une histoire d’une façon subjective, du point de vue de Nilin. D’autre part, car l’univers de Néo-Paris est sûrement trop vaste pour ne pas bloquer certains passages, et ainsi éviter de perdre le fil de l’histoire.
Heureusement, les niveaux de Remember Me sont basés sur trois strates, ce qui permet d’éviter le terrible effet couloir. En effet, Néo-Paris est construit sur trois niveaux, les bas-fonds, la ville, et les toits.
Nous commençons donc l’aventure dans un entrepôt, alors qu’Edge nous ordonne de rejoindre la zone Slum 404. Or, cet endroit n’est rien d’autre qu’une zone abandonnée dans les égouts de Néo-Paris. Heureusement, il ne faudra pas longtemps à Nilin pour rejoindre la surface. Et nous atteignons les hauteurs de la ville, éblouis par le bleu du ciel et la hauteur des bâtiments haussmanniens. Alors que les eaux ont submergé, et littéralement pourri une parti de la ville, les nantis se sont élevés.
Nous passons donc d’un décors sale, inondé et infesté par des montres, à la ville, ses habitants habillés de blanc et ses robots volants.
Pour autant, malgré cette approche originale de la ville, nous reconnaissons aisément la capitale du romantisme et du tourisme. Ainsi, nous retrouvons la tour Eiffel, l’Arc de triomphe, et la tour Montparnasse. Symboles de Paris qui s’élèvent au loin, alors que nous escaladons ces hautes battisses du 20ème siècle et de l’Art nouveau.
Enfin, les effets de couleur et de lumière sont très réussis. Même si la ville semble parfois un peu inanimée, les décors se regardent comme des tableaux.
C’est donc dans ce clivage social et visuel, que Nilin arpente les rues à la recherche de son passé. Là aussi, les éléments du décors en racontent autant sur le background de la ville, que sur les bagages émotionnels de Nilin. Comme cette affiche de panda…
De la musique sans faille
La musique raconte aussi le passage d’un univers classique et connu, au numérique et transformé. Symphonie réorchestrée, la musique nous emporte dans le futur de 2084, où un son organique est devenu digital. Là aussi, elle se retrouve fragmentée, comme si elle avait vécu les affres du temps, tout en soutenant l’action de Nilin.
En effet, tout les morceaux sont construits autours du personnage principal, alors que les autres intervenants ne font qu’apporter une autre dimension.
La musique est donc entraînante et cohérente avec l’univers de Remember Me et le personnage de Nilin.
Quant aux phases de combat, elles sont aussi dynamisées par l’arrivée d’instruments électroniques, aux sonorités 8 bits. Les bruitages ne sont ni trop présents, ni agaçants. Au contraire, ils sont les bienvenus pour donner plus de pêche aux combats. Nous pouvons seulement regretter, le menu des combos qui n’a pas de musique, alors que nous y retournons souvent.
Enfin, mettre en avant le personnage de Nilin par la musique est loin d’être anodin. Au contraire, c’est un parti pris qui n’est pas sans rappeler la cohérence de l’univers, et la personnalité de Nilin. Simplement, imaginons que nous nous moquons complétement du destin de ce personnage. Quelle part d’identification nous reste-t-il, si on nous raconte tout sur son histoire, ses souvenirs, et ses traits de caractère ? Je crois que c’est pour cela que je conseille de nous rabbatre sur le panda…
Conclusion, remember or not ?
Remember Me ne sera certainement pas un mauvais jeu ! Mais il ne sera peut-être pas indispensable…
Les décors sont superbes, la musique est entraînante, l’histoire est pour l’instant cohérente. Néo-Paris, sans bouleverser le genre, est une ville suffisamment détaillée avec ses milieux sombres ou éclairés pour nous faire voyager. Les niveaux plus déstructurés et futuristes sont une franche réussite. De plus, le personnage de Nilin, animée et doublée avec soin, est charismatique. La prise en main est intuitive, et les situations rencontrées semblent variées.
Cependant, il n’y a un je-ne-sais-quoi redondant… La création de combos, les combats en semi-arènes, les chemins linéaires, les cinématiques pour raconter un passage clef… Surtout, dans ce désir de trop bien faire, nous reste-t-il une place pour nos émotions ?
Cette preview n’est qu’une première impression sur un peu moins de la moitié du jeu (huit heures semblent à prévoir). Alors, il est peut-être trop tôt pour juger Remember Me et Nilin, son personnage. Gardons en mémoire que ce début d’aventure est agréable, et retenons que le panda s’appelle Jax… Remember him !