Rediffusion : Joypad.fr publie à nouveau d’anciens articles. Notamment cette interview de Viktor Kalvachev réalisé lors du MAGS de Monaco en mars 2013.
Viktor Kalvachev est un dessinateur de bande dessiné et directeur artistique pour HeSaw sur le jeu vidéo Blue Estate, qui s’inspire du comic éponyme.
Quel est ton travail ?
Aurélie Knosp : Tu précises travailler 95% en peinture digitale ? Quels sont les 5% restants, le croquis ?
Viktor Kalvachev : Récemment, il y a quelques mois, j’ai commencé à dessiner et à peindre sur du papier dans le cadre d’une exposition à la galerie Art Ludik à Paris, et pour cela j’ai du faire quelques oeuvres avec des média traditionnels.. Donc j’ai du créer environ 40 pièces de carnet et de technique différent sur le papier, ce qui est déjà pas mal et ensuite j’ai du produire pas mal d’œuvre avec des logiciels comme Corel ou Photoshop, juste parce que cela me donnais du volume et de la vitesse, c’est rapide et cela peut surprendre, mais c’est assez cool.
AK : Tu dis être inspiré de nombreux inconnus ? Peux-tu en citer quelques-uns ?
VK : Des exemples ? Parfois vous savez, vous ouvrez Facebook et apparaît alors une personne que vous ne connaissez pas et qui ne sait pas qui vous êtes, il vit en inde et sa photo vous parle vraiment, alors l’envie de dessiner prend. Vous ne savez pas qui il est, il n’est pas dans votre liste d’ami, des amis que vous connaissez aime ce qu’il fait et je pense que c’est vraiment très intéressant que l’on vit dans une époque qui nous expose à des choses, que l’on ignore, aussi rapidement. Quelqu’un fait quelques choses et en quelques minutes, le monde est au courant. Vous savez le temps où des grands noms on fait de grandes choses est toujours là, mais il est fascinant de voir comment on peu suivre des artistes dont ignore tout et qui vivent dans une petite ville et voient ainsi l’information se rependre aussi rapidement, le talent est partout et c’est aussi bien pour eux, pour se faire connaître, il ne sont plus limité a être dans une petite ville. Ils peuvent évoluer et grandir artistiquement parlant, tout en étant très loin.
« Soudain le talent est partout »
AK : Lorsque tu commences une toile, as-tu une idée très précise du résultat ? As-tu beaucoup de contraintes, ou te laisses-tu guider par ton trait ou la couleur ?
VK : C’est différent actuellement, c’est très différent, parlons du dessin, il peut s’agir d’un grand projet et je sais exactement ce que je veux faire, c’est comme voir un dessin entrain d’être réalisé et c’est comme si je répétais l’action. C’est simple et facile. Parois vous avez le feeling de vouloir le faire, mais vous n’êtes pas certains de voir à quoi cela va ressembler. Vous essayez que cela y ressemble, vous dessinez quelques lignes et vous voyez ce que cela donne. Je ne suis pas sur de ce que je fais, mais il ne faut pas trop penser et juste laisser venir le dessin, faire sortir les lignes, le tracé, je ne suis pas sur de ce que cela va donner exactement, mais j’ai le feeling de ce que je souhaite faire. Puis à d’autres moments, quand c’est un projet au budget limité dans le temps, j’essaie d’être organisé, mais les choses n’iront jamais comme prévu dans le plan. En fait rien ne suis le plan et le meilleur plan est actuellement celui qui assume cela. Si vous assumez que les choses ne suivront pas le plan, alors vous avez de plus grande chance de connaître le succès, que d’avoir un plan. Car si la chose ne va pas dans ce sens vous paniquez.
« Si vous assumez que les choses ne suivront pas le plan, alors vous avez de plus grande chance de connaître le succès »
L’autre soir on était dans un restaurant et il y avait ce serveur qui était fantastique, c’était un restaurant italien et il semblait être un toréador entre les tables, il soulevait les verres justes en bougeant ses épaules, tout était si dynamique. L’image de cette personne est gravée dans ma tête, donc hier matin je devais le dessiner et je savais exactement ce que j’allais dessiner. C’est clair et précis, je savais, j’avais l’image dans la tête et comment l’exécuter, ceci est un exemple facile. Pour l’exemple difficile, c’est Blue Estate, quand tu travail avec onze artistes super talentueux et que tu change le style en milieu de pages plusieurs fois, il vous être très organisé, ceci est un exemple d’un projet très difficile, dans un comics.
AK : Comment fonctionnent tes collaborations avec les scénaristes ? Quelle est ta place dans l’élaboration de l’œuvre globale ?
VK : quand vous travaillez avec des personnes, spécialement dans mon job avec le directeur créatif ou le directeur artistique, votre travail c’est de diriger tout le monde, mais pas uniquement, c’est de reconnaître leur meilleurs atouts et de vous surprendre avec ce que vous pensiez qu’ils auraient pu faire, mais qu’ils peuvent encore ce surpasser. C’est toujours une collaboration, c’est toujours travailler avec différentes personnes et l’astuce c’est de garder une équipe saine et très communicante. Que tout le monde trouve du plaisir dans ce qu’il fait et du moment que l’on a tous ça, le travail ne peut être que bon. Si tu mets de l’égo dans cela, tu oublies que ce sont des humains et tu risques de faire très mal à quelqu’un et ce n’est pas comme ça que l’on fait les choses. Je fais des comics parce que c’est fun, je dessine parce que c’est fun et je ne souhaite pas changer cela.
« Je fais des comics parce que c’est fun, je dessine parce que c’est fun »
Quel est ton parcours ?
AK: Peindre et dessiner est-il une vocation technique, celle de maîtriser l’outil graphique ? Ou es-tu plus porter par le besoin de raconter une histoire ?
VK : Ce sont des choses différentes, c’est ce que j’ai dis un peu plus tôt, le serveur du restaurant italien, c’est aussi fort qu’un personnage que je voulais dessiner. Parfois quand je dessine quelques choses, elles semblent être attaché à une histoire. Ce que je préfère dessiner, ce sont les gens, trouver ce qui les rends différents, des personnalités fortes et quand je vois des gens qui ont quelques chose de fort, j’essai de m’en souvenir. Pour raconter des histoires c’est différent, dans mon premier livre, ce qui était important pour moi était la narration et le dessin. Comment créer le l’envie de lire ? Je n’ai besoin que d’une simple histoire pour le faire. Comment le faire ? Comment le créer ? Ceci est mon objectif. Avec Blue Estate, l’histoire est très importante et les caractères le sont tout autant, la narration sert l’histoire et l’art sert la narration. Ce sont juste différente approche qui dépende de là où tu va. Et à propos de simples dessins, parfois si je fais une illustration c’est juste pour du fun. J’essai juste de savoir, d’où est ce que ça viens, d’où viennent ces personnes. Pourquoi ? Et cela m’aide à trouver les détails qui font l’illustration plus intéressante quand vous la voyez et elle vous interroge et vous commencez à y réfléchir.
AK : Quelles sont tes références ? A la fois contemporaines (bd, comics, cinéma, publicité…), mais aussi plus classique (peinture, sculpture, gravure…)
VK : Il y a trop de chose qui m’inspire, beaucoup trop. La liste serait très longue et les personnes que j’aimerais mentionner seraient trop nombreuses. // (NdR: Un en particulier ?) // VH : Il y a quelques années j’ai découvert un livre, Black Sam, une grande inspiration. Je pense à beaucoup de monde, c’est difficile, non, ça deviendrait fou si je commence à en parler ça prendrais une demi-heure. // (NdR : Ca va on a le temps :)) // VH (sourire et rires) : les meilleurs morceaux de chacun… Par exemple l’équipe qui a travailler sur Blue Estate, Tobby Sampras ( ?) j’aime vraiment des choses particulière qu’il fait et j’en suis très inspiré, Tom Cocker ( ?), Nathan Folks ( ?), Beaucoup d’humour sur tout ce qu’il fait, Rudolph Gueradan ( ?) qui travail à Dreamworks, un brillant artiste et quelqu’un de vraiment cool et un très bon écrivain et qui fait de fantastique dessins, Pierre Allerie ( ?) un artiste fantastique, ils sont tellement nombreux, les gens de chez Massive Black ( ?) pour exemple, Bruno Gorre ( ?) un très bonne ami, une immense inspiration, il était une des personnes, quand je faisais les couverture de Blue Estate avec qui je dialoguais sur Internet et quand je faisais une illustration, je lui envoyait et s’était une paire d’yeux supplémentaire. Vous savez je travaillais de chez moi et j’avais besoin d’un autre regards et il me disait ce qu’il en pensait. Beaucoup d’artistes, Travis Sharrey ( ?), fantastique, Daves Johnson ( ?) la plupart de ces personnes que j’ai mentionné sont mes amis et au travers de ces amitiés j’ai découvert bien plus à propos d’eux. Un écrivain Mike Minola ( ?) sensationnel, Adam Huse ( ?), Robert Mcganys ( ?), et i on retourne aux classiques, il y a tellement de chose magnifiques, d’artistes et d’inspirations, juste retourner en bas sur le showfloor et il y a tant à voir, il y a probablement cents choses à voir et qui m’inspire a dessiner. Vous savez ce qui peut être fait avec les mangas et je n’ai pas un seul manga et cependant il y a un million de chose sur le salon qui m’inspire. Je ne regarde pas pour un style en particulier, ou un artiste, ou des couleurs, ou des expressions pour être inspiré. Je suis très chanceux, il y a beaucoup de chose que j’apprécie et pourquoi je dessine dans différents styles. Avez vous vu mon livre Female of Species ? Si vous le feuilletez, vous pourrez voir que chaque dessin est différent et c’est le but du livre.
AK : As-tu toujours rêvé de faire de la BD ? Ou ta passion pour le graphisme vient d’un autre média ?
VK : Actuellement j’ai toujours voulu faire des comics, je suis né en Bulgarie et le seul magazine de bande dessiné qui venait de l’Ouest, était Pif Gadget et j’ai grandi avec. A moins de parler français, je n’avais aucune idée de ce qui se passait, alors je les ai regardé, regardé et regardé et c’était fascinant, chaque détails de chaque dessin et je savais que voulait vraiment faire de la bande dessinée. Mais la bande dessinée était mal considérée dans la communauté des artistes bulgares et ce n’était pas considéré comme ce que devais faire un véritable artiste. Quand j’ai mentionné que je voulais faire des comics, il n’y avait aucun support financier pour faire l’académie des arts. Mes professeurs me disaient, que c’était la dernière chose que je devrais faire. Il est très difficile de faire de bons comics et une bonne narration et cela m’a pris des années pour accomplir cela et je suis très content car c’était mon rêve de faire des histoires courtes et c’est fantastique, je me sens vraiment chanceux et content d’avoir pu réaliser cela.
Quelles sont tes perspectives ?
AK : Pour ton livre « Female of the Species », avais-tu plusieurs archétypes de femmes en tête ?
VK : Ce livre est une sorte de célébration des formes féminines et contient plusieurs styles de ma perception des femmes. Les femmes sont magnifiques, de toutes tailles, couleurs, formes… Et on les aime, elle nous mène à faire des choses que l’on ne pourrait faire autrement et dans ma vie elles sont une grande force de direction. J’aime ma femme et j’ai fait beaucoup de chose grâce à elle, elle est ma plus grande source d’inspiration. Je vois constatement de la beauté autours de moi de différente femme et comme vous pouvez le voir dans le livre elles sont toutes différentes, il n’y a pas un stéréotype.
AK : Le mode d’expression graphique prend-il le pas sur la personne à représenter, ou inversement ?
VK : Ils m’inspirent pour travailler dessus. Beaucoup de mes dessins sont exagéré, sinon il ne s’agirait que d’un portrait. Mon imagination va très vite, c’est comme si vous prenez une photo du serveur dont je vous ai parlé, c’est un peu exagéré et grotesque, car je ne pense pas qu’il aurait voulu devenir un toréador, mais c’est ainsi que je l’ai vu et les tables était les taureaux et les bouteilles les épées qu’ils plantait dans chacun d’eux. Dans mon imagination cela était très amusement de l’imaginer dans ce rôle de Donquichotte, il été complètement hors du temps. C’est un restaurant très simple et cela n’a pas demandé beaucoup d’implication de sa part, mais tout de même, c’est comme s’il faisait sa performance pour 10 000 spectateurs et que personne ne le regardait. C’était très intéressant, très drôle et je suis sur que personne d’autre ne voyait cela de la même façon.
AK : Es-tu déjà tombé amoureux d’une de ces femmes peintes ?
VK : Bien sur, de ma femmes. (sourire) J’ai dessiné ma femme plusieurs fois, mes amis me disent qu’ils peuvent voir une part d’elle dans chaque modèle que j’ai dessiné. Ce n’est pas intentionnel, c’est juste ainsi.
Merci.