Je ne vais pas y aller par quatre chemins… Le trailer du jeu Void&Meddler est une tuerie ! Les développeurs nous présentent le gage d’un univers sombre, punk et sans moral. Découvrez un monde teinté de mélancolie quand on plonge dans le regard de l’héroïne, ou de science fiction quand on découvre des rats à une Rave Party.
Soutenus par Mi-Clos Studio (Out There), les indépendants du studio no CVT font rage d’un esprit de liberté sans limite. Le jeu est poussé par une direction artistique singulière qui aura attisé ma curiosité. Pour en savoir plus (car comme moi, vous bavez d’y jouer), découvrez notre interview des développeurs qui, comme le jeu, est sans demi-mesure.
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Aurélie Knosp : Bonjour no CVT, équipe derrière Void&Meddler ! Dîtes moi si je me trompe, il ne va pas être joyeux votre jeu ?
No CVT : Bonjour Joypad ! 1ère question, on va direct au but, très bien, ça me plait !
J’imagine qu’on est un peu formaté par tout ce qu’on aime plutôt que l’inverse, et peu importe le média, tout ce qui nous touche n’est en effet jamais très joyeux en apparence. Je suis certain qu’on pourrait passer des heures à déblatérer là-dessus, je pourrais te dire que ouais, « c’est ça la vie », mais ça serait un peu mentir, j’en ai pas grand-chose à faire et le jeu n’a pas été réfléchi en ce sens. On aime ça c’est tout ; quand les héros meurent à la fin, quand les contrastes sont radicaux, quand personne n’est vraiment bon et qu’on ne peut pas s’identifier aux personnages, ou pire, quand on trouve quand même le moyen d’éprouver de l’empathie pour ces losers.
A.K : Parmi les créateurs, nous retrouvons Dorian et Trevor, deux musiciens nourris au Noise Rock des 80’s, à la synthwave sombre et industrielle, aux roadtrips et à la littérature cyberpunk. Pouvez-vous expliquer ces références et donner quelques exemples ?
No CVT : Nous nous sommes rencontrés il y a maintenant 7ans, avec un but bien précis à l’époque, partager et créer ensemble sans se poser de questions. On ne pouvait plus se lâcher, d’un point de vue musical d’abord, mais tout ça a très vite débordé sur d’autres choses. Des soirées à visionner des films obscurs, à écrire des bribes de nouvelles, en passant par un réel goût pour prendre la route à travers l’Europe lors de nos concerts.
Et donc pour répondre à ta question, notre truc c’est la musique répétitive, lourde, qui rend autiste à hocher la tête pendant des heures, les montées bruyantes et les fins de morceaux fracassantes. C’est quelque chose qu’on retrouve sensiblement dans tout ce qu’on écoute, de Gesaffelstein à Mudhoney en passant par les Swans, ou Kap Bambino. Il en va de même pour la littérature et le cinéma, on apprécie particulièrement les histoires incisives, les nouvelles de K. Dick qui nous ont bercées en tête de liste, mais aussi des auteurs comme Jeff Noon, Gibson ou encore Mark Z. Danielewski pour rester simple. Question image, on ne s’éloigne pas trop, on cite tout le temps Araki, Cronenberg et Tsukamoto comme étant nos principales influences en matière de cinéma, mais j’ajouterais à ça quelques réalisateurs expérimentaux comme Stan Brakhage ou Paul Sharrits, pour leur vision radicale du médium cinématographique. Les œuvres de photographes comme d’Aagata et Moriyama croisent souvent notre chemin et sont parfois une grande source d’inspiration lors de nos recherches pour la création du jeu.
A.K : Expliquez-nous votre première création, NoWave, développée pendant une Game Jam ?
No CVT : Le thème de la jam était les années 70/80 à New York. Forcément ça a fait tilt et on a eu envie de rendre hommage à la scène No Wave née là-bas, une musique à contre-courant, éphémère, et violente. On y retrouvait les débuts de Sonic Youth, Foetus, même Nick Cave a fait partie de cette scène. Bref, on ne pensait même pas pouvoir arriver à finir le jeu au bout des 48h tellement les problèmes ce sont accumulés. A la base deux programmeurs et un graphiste nous aidaient. Mais finalement nous sommes repartis de zéro, moi-même sur Unity, et le pixel art, Trevor sur les dialogues et la cohérence générale. Et miraculeusement le jeu a fini par fonctionner. Mais la grosse surprise ce fut de voir que le thème choisi ne parlait pas seulement à 2/3 personnes, de Rock Paper Shotgun en passant par Pitchfork ou les Inrocks, la presse a été intriguée par le projet sans qu’on ait le temps de comprendre quoi que ce soit. Cela nous a même valu quelques problèmes, mais je n’ai pas le droit d’en parler plus.
Recherche photo par Trevor
A.K : Vous avez ensuite fondé no CVT. Que veulent dire ces initiales ? Quel est le leitmotiv de la boîte ?
No CVT : Ça n’a aucune signification littérale, c’est plutôt affectif. Ca renvoie directement à notre première asso, I Disagree, avec laquelle on a longtemps organisé des concerts sur Lyon.
A.K : Après une seconde Game Jam, vous développez les prémices du Point&Click Void&Meddler. Quelles sont les particularités de votre jeu ? En quoi l’univers est-il cyberpunk et « sale ». Qu’apporte la psychologie du personnage sur l’ambiance et la manière de jouer ?
No CVT : Pour Void&Meddler, on a d’abord voulu développer un univers, une histoire comme nous pouvions le faire dans nos petites nouvelles. Quelque chose de percutant, intense et minimaliste s’inspirant de tout le background accumulé au fil des années. On retrouve donc un futur proche, pas forcément tout-technologie comme dans les classiques du cyberpunk. Mais avec ce concept de décadence, d’innovations plausibles ou surréalistes amenant de nouvelles problématiques à l’humanité. Et pour contre balancer le côté froid et cliché, l’histoire portera plus précisément sur une personne, Fyn, sur son quotidien, quelles sont ses émotions, ses réactions par rapport à tout ça. L’idée c’était vraiment de rapprocher deux mondes, l’un sale et répulsif, et l’autre au contraire touchant, blessant, poétique mais pas mièvre, et où l’on ne peut s’empêcher d’être empathique.
Et puisque tu parles de la psychologie du perso par rapport à la manière de jouer, ça me permet d’amener la mécanique de gameplay. Il fallait quelque chose d’intéressant, donnant envie au joueur de revenir, de recommencer le jeu pour percevoir les changements suivant ses actions. A travers Fyn, chacune de vos décisions importantes influenceront sa vision/votre vision du monde, ses réactions face aux gens, la manière de résoudre les problèmes rencontrés.
Recherche photo par Trevor
A.K : Vous, musiciens, vous êtes ensuite associés à trois illustrateurs (une pour les portraits et un duo pour les décors). Quelles directions artistiques ont été données ? Ont-ils apporté une touche particulière qui aurait modifié le game design et/ou l’histoire ?
No CVT : Nous avons fait un travail de recherche pour la direction artistique, Trevor a fait toute une série de photos très inspirantes. Mais en dehors de ça, nous laissons nos illustrateurs assez libre d’amener leur patte. Des indications textuelles sont données sur la personnalité des personnages pour les portraits, et on réalise plusieurs schémas que l’on propose à Sandra et Mathieu pour la partie des décors. Et oui bien sûr nous ne sommes pas des tyrans, lorsqu’ils ont des idées cohérentes avec l’univers, on échange et cela peut nous amener à retravailler une scène par exemple.
Portrait de Fyn, par Sera
Recherche photo, par Trevor
A.K : En quoi Michael Peiffert (Mi-Clos), mentor et éditeur, vous aide-t-il à ne pas tomber dans des pièges ?
No CVT : On a l’habitude de travailler en tant que musicien, j’ai ma propre micro-entreprise, on est signé sur un label pour notre groupe, etc. Et même si l’approche n’est pas si éloignée sur certains points, gérer un studio indé c’est tout nouveau pour nous. La communication pour un musicien et pour un développeur, ce n’est pas du tout la même chose. Faire des choix lourds de conséquences aussi bien sur le moral que financièrement, c’est aussi quelque chose de nouveau. Et Michael de par son expérience, ayant connu les mêmes problématiques, nous aide face à tout ça.
A.K : Pourquoi tant de rancune avec la réalité (« Nobody likes the smell of reality ») ? Donc, ça sent quoi la réalité… Et votre imaginaire n’est pas un peu réel aussi ?
No CVT : Je pense que c’est un genre de fardeau qu’on traine depuis longtemps, une sorte de vision lucide des choses, c’est un peu con à dire, mais ça date de l’univers construit étant ado, les films, la musique, les drogues, tout est bon pour s’échapper. On a grandi, certes, la trentaine approche, mais c’est une impression qui persiste, les gens sont mornes, la télé aseptisée et les esprits sont vides. Ça ne nous suffit pas. Alors on façonne comme on peut, pour remplir les poches d’air qui sont dans nos crânes. Tout ça pour terminer au même endroit que tout le monde. Bon ok, là je pars un peu loin mais dans tous les cas, ce n’est pas triste, on profite juste différemment de cette réalité.
A.K : Faut-il traduire Void&Meddler par « Vide et Fouille-merde » ? Vous parlez de qui avec ce titre (si c’est du joueur, il ne va pas être content ^^) ?
No CVT : Je ne serais pas aussi direct dans la traduction (je préfère le terme de fouineur) mais oui on peut le traduire comme ça. Et le titre fait écho directement à Fyn et à la problématique qu’elle va rencontrer tout le long du scénario : comment retrouver une humanité à priori perdue deux années après son amnésie ?
A.K : Dites-nous en un peu plus sur Fyn, personnage principal, et son introspection avec le joueur ?
No CVT : Comme je viens de le dire, il s’est écoulé deux ans après son amnésie lorsqu’on retrouve Fyn au début du jeu. Le joueur devra alors essayer de comprendre en même temps qu’elle non pas pourquoi ni comment elle s’est retrouvée là, mais ce qu’elle va faire pour passer à autre chose.
A.K : Quel est le point fort de votre jeu ?
No CVT : Son thème et sa rejouabilité! C’est un jeu qui nous ressemble, qui est le produit de ce qu’on aime, sans compromis et qui sortira des sentiers battus. La mécanique de jeu non linéaire permettra au joueur de s’imprégner de l’univers, qui évoluera selon ses actions au cours des chapitres.
A.K : Syberia pour l’héroïne, de la drogue et la manipulation des souvenirs, on pense nécessairement à Bioshock et Remember Me… Quelles sont vos sources d’inspiration ?
No CVT : En dehors des influences littéraires, cinématographiques, et musicales que sont Philip.K.Dick, William Gibson, David Cronenberg, Gregg Araki, Nine Inch Nails, Portishead, etc. nous nous inspirons également de questions actuelles qui font débat au sein de la scène sociale. L’identité, transcender les normes, c’est quelque chose qui nous intéresse beaucoup comme tu as peut être déjà pu le comprendre.
Recherche photo, par Trevor
A.K : C’est quoi une morale et la liberté (thèmes forts de votre jeu) pour vous ?
No CVT : Les gens font leurs propres choix, qu’ils soient bons ou mauvais. L’idée, c’est que nous ne sommes pas là pour juger, pour dire que nous sommes meilleurs. La question, c’est « qu’est ce vous, vous auriez fait ? ».
A.K : En quoi l’émergence de la scène indépendante vous permet de créer sans limite ? Vous voulez dire par les thèmes abordés (pas de censure), par la gestion du temps et de l’argent, par le public visé, … ?
No CVT : Un mélange de tout ça, pas de censure sur le thème avec la possibilité de sortir de certains schémas stéréotypés, pas de contraintes financières (quoique), etc.
A.K : Considérez-vous le jeu vidéo comme un art à part entière ?
No CVT : Le jeu vidéo peut être un art oui, nous ne nous posons même plus la question de notre côté, les fait sont là. Particulièrement avec la scène indé, des choses improbables sortent et quand tu joues à ces jeux, tu es submergé d’émotions. Et comment décrire l’art autrement que par des ressentis profonds, incontrôlables ?
A.K : Qu’apporte de plus le jeu vidéo qu’aucun autre Media ne pourrait donner à Void&Meddler ?
No CVT : L’interaction, faire participer le public. Le jeu vidéo évoque tes sens, ton imaginaire, mais il te permet aussi d’avoir un certain contrôle sur ce monde. Non seulement le joueur peut interpréter et ressentir à sa manière un jeu comme on le ferait pour les médias plus classiques. Mais l’aspect fort c’est qu’aucune partie ne se ressemble. Que ce soit dans les point&click, les FPS, ou les RTS, à chaque fois que tu relances le jeu un nouvel élément non présent auparavant peut apparaître. Tu veux refaire une mission ? Pas de soucis, tu as le contrôle. Or, souvent tu vas essayer de nouvelles choses, tester les réactions. Tu en ressorts avec une expérience nouvelle à chaque fois.
A.K : Sur quels supports prévoyez-vous de sortir Void&Meddler ?
No CVT : Il sortira d’abord sur PC-Mac, mais on réfléchit à une sortie sur mobile et tablette une fois tous les épisodes terminés.
A.K : Pourquoi le choix du format épisodique ? Pour quand le premier épisode et à quelle fréquence les autres chapitres ?
No CVT : Le format épisodique c’est une volonté d’abord scénaristique, créer une attente chez le joueur, qu’il prenne son temps d’apprécier chaque petite chose et qu’il revienne dans cet univers plus tard avec toujours la même envie. Le second atout à ne pas prendre à la légère, c’est le côté financier. Nous sommes un studio de cinq indépendants, auto-financé. C’est un aspect auquel nous tenons énormément, ainsi nous n’avons aucun compte à rendre. Mais tenir un an ou plus sans aide aurait été un réel problème. La vente de chaque épisode nous permettra de continuer le développement de manière plus sereine.
Et donc le 1er épisode est lui prévu pour octobre 2015. Chaque épisode contiendra 2 chapitres, il y aura donc en tout 3 épisodes. Pour la fréquence de sortie, nous partons sur un épisode tous les 5 à 6 mois maximum.
A.K : Un conseil pour ceux et celles qui voudraient développer des jeux vidéo ?
No CVT : Nous sommes assez mal placés pour en parler, le studio est assez récent et nous avons encore beaucoup de choses à apprendre. Être prêt à affronter le pire et continuer à avancer quoi qu’il arrive, comme nous l’a fortement martelé notre passé de musicien, est surement le meilleur conseil qu’on puisse donner.
A.K : Enfin, comme vous tenez tant à la liberté… Un dernier mot pour dire ce que vous voulez ;).
No CVT : Ne vous fiez pas aux apparences, on rigole sans arrêt entre nous. Mais ne perdez pas de vue une chose, le temps lui n’oublie rien.
Petite, Aurélie faisait du poney sans selle et décapitait ses barbies. Plus grande, elle réclamait des billes et un robocop. On lui disait "Plus tard, tu feras du dessin, à quoi elle répondait, "Non je veux faire du jeu vidéo". Ses premiers amours, Crash, Abe et Donkey l'ont finalement amené à faire une licence de dessins (LISAA), puis un Master graphisme dans une école de jeu vidéo (l'ENJMIN). C'est à ce moment qu'elle commença à écrire sur le jeu vidéo et la peinture, pendant un an dans IG mag. Une chance de plus qui l'amena au monde de la rédaction. Après quelques conduites de projets pédagogiques sur l'art et le jeu vidéo (pour prouver au monde entier que jouer est fondamental), la petite est toujours petite mais un peu moins. Et c'est avec eurogamer.fr devenu joypad.fr qu'elle continue à parler du jeu vidéo comme une culture, voir une forme artistique.
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